Mme la présidente. La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le Sénat examinera au début du mois de novembre le projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures de préparation au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne. Nous aurons sans doute alors l'occasion de discuter, en détail, des conséquences de ce retrait pour notre pays et, bien entendu, pour l'ensemble de l'Union européenne.
En attendant, je souhaite évoquer l'une d'entre elles dès aujourd'hui : la perte budgétaire que va représenter le départ du Royaume-Uni, laquelle pourrait s'élever à plusieurs dizaines de milliards d'euros, selon les contours du futur accord. (Mme la ministre fait un signe de dénégation.) Je vois que vous n'avez pas l'air d'accord avec moi, madame la ministre. Vous nous donnerez sans doute des précisions à cet égard.
Je m'interroge sur les négociations en cours à l'échelon européen s'agissant du prochain budget de l'Union européenne. Dans son relevé de conclusions, le Conseil européen du mois de juin avait pris note de l'ensemble des propositions sur le cadre financier pluriannuel pour la période 2021–2027 présenté par la Commission le 2 mai 2018, ainsi que des propositions législatives sectorielles pour les programmes soutenant les politiques européennes. À cet égard, je m'inquiète des moyens alloués à une politique sectorielle en particulier, la politique agricole commune.
Mon groupe avait approuvé le 6 juin dernier la proposition de résolution du Sénat en faveur de la préservation d'une PAC forte, conjuguée au maintien de ses moyens budgétaires. Depuis, dans une déclaration commune, dont on peut se féliciter, Berlin et Paris ont demandé « la stabilisation du budget de la PAC ». L'Allemagne est un allié de poids pour défendre les moyens de la PAC, qui, on le sait, pourraient baisser d'au moins 5 % si l'on s'en tient aux propositions de la Commission.
Madame la ministre, je ne méconnais pas les besoins croissants de l'Europe en matière de défense et dans le domaine du numérique, mais l'indépendance agricole et alimentaire représente également un enjeu très stratégique. La France, grande nation agricole au sein de l'Union européenne, contribue très fortement au maintien de cette indépendance.
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Yvon Collin. J'en termine. C'est pourquoi j'aimerais connaître l'évolution des négociations financières sur la PAC, qui seront également décisives pour répondre au grand défi environnemental.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Nathalie Loiseau, ministre auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes. Monsieur le sénateur Collin, vous avez raison, le départ du Royaume-Uni se traduit aussi sur le plan budgétaire. Le budget européen perdra de 10 milliards à 12 milliards d'euros par an avec le départ du contributeur net qu'est le Royaume-Uni.
La négociation du prochain cadre financier pluriannuel est évidemment compliquée par ce départ, ainsi que par l'émergence de nouvelles priorités, sur lesquelles tout le monde s'accorde, qu'il s'agisse de la défense, de la réponse au défi migratoire ou d'une meilleure réponse aux besoins d'innovation de l'Union européenne.
Pour autant, comme vous, je considère que la politique agricole commune est plus moderne que jamais et qu'elle fait partie de ces politiques ayant une véritable valeur ajoutée européenne. Nous la défendons ardemment depuis le début, depuis la présentation du projet de budget par la Commission.
Nous avons dit que le budget de la PAC n'était pas acceptable et qu'il ne serait donc pas accepté. L'ex-ministre de l'agriculture Stéphane Travert a fédéré vingt et un États membres de l'Union européenne en faveur du maintien des crédits alloués à la PAC à vingt-sept par rapport aux crédits du cadre financier pluriannuel actuel.
Les négociations commencent à peine. La présidence autrichienne a émis certaines hypothèses, que nous avons immédiatement combattues. J'ai eu l'occasion de le faire hier lors du conseil Affaires générales. Au mois de décembre, le Conseil européen se saisira de la question du prochain budget européen. Nous souhaitons évidemment avancer vite mais pas à n'importe quel prix. Nous voulons un bon budget, et pas un budget à tout prix avant les élections européennes. D'autant qu'il nous paraît essentiel que les électeurs puissent s'exprimer sur leurs priorités. Nous devons décliner ces priorités dans un budget, et non l'inverse.