M. Jean-Claude Requier. L'hydrogène, dont nous connaissons les qualités pour l'industrie, doit être regardé comme un carburant du futur et comme un moyen efficace de stockage de l'énergie, en complément à l'intermittence des énergies renouvelables. Le « power to gas » permettra ainsi de convertir l'électricité produite et d'injecter directement l'hydrogène dans le réseau de gaz.
Nous en sommes convaincus : l'hydrogène vert contribuera à l'indépendance énergétique de notre pays. Une étude publiée en avril dernier estime qu'il sera en mesure de répondre à un cinquième de la demande d'énergie finale en 2050, soit l'équivalent d'une réduction de 55 millions de tonnes de CO2.
Monsieur le ministre d'État, reprenant l'expression de votre prédécesseur, les élus de mon groupe ont toujours considéré l'hydrogène comme le « couteau suisse de la transition énergétique ».
Des initiatives jusque-là diffuses ont vu le jour et connaissent une accélération grâce à la baisse des coûts des électrolyseurs et à l'arrivée à maturité des technologies. La France doit saisir cette chance au plus vite, comme l'ont fait l'Allemagne, le Japon ou les États-Unis ; elle dispose de compétences solides et d'entreprises prêtes à relever le défi.
Il a fallu attendre le plan de déploiement présenté le 1er juin dernier par le Gouvernement pour qu'une véritable stratégie soit enfin élaborée. Il était temps ! Mais cette stratégie reste en deçà de nos attentes sur plusieurs points : faiblesse des moyens dédiés – seulement 100 millions d'euros ; manque d'ambition de l'objectif de 100 stations de distribution en 2023 – l'Allemagne en prévoit 400 à la même échéance. Tout cela n'est pas très incitatif pour les constructeurs automobiles français…
Aussi, monsieur le ministre d'État, pourriez-vous nous indiquer quelle place occupera l'hydrogène dans la prochaine programmation pluriannuelle de l'énergie et quels financements seront affectés à son développement à moyen et long termes ? Il ne peut y avoir de stratégie sans visibilité !
M. le président. La parole est à M. le ministre d'État.
M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur, vous avez tout à fait raison d'insister sur le rôle que peut jouer l'hydrogène. Toutefois, soyons clairs : pas plus hier qu'aujourd'hui ou demain, il n'existe d'énergie miracle.
M. Jean-Claude Requier. Certes !
M. François de Rugy, ministre d'État. Pour ma part, je crois à la diversification ; et, dans la diversification, il y a évidemment une place pour l'hydrogène. Le Gouvernement en est d'ailleurs convaincu, et il a décidé de débloquer un programme de 100 millions d'euros, destiné essentiellement au financement de recherches.
Il faut le reconnaître : aujourd'hui, l'hydrogène utilisé en France dans l'industrie, soit, tout de même, un million de tonnes, est à 95 % issu d'énergies fossiles. Il faut donc transformer complètement la production d'hydrogène et relever nos objectifs d'hydrogène propre, d'hydrogène renouvelable. (M. Jean-Claude Requier le concède.)
L'hydrogène peut servir de carburant, même s'il faut tenir compte de certaines particularités – les réservoirs d'hydrogène imposent beaucoup plus de contraintes que les réservoirs de carburants classiques. Il peut également constituer un moyen de stockage et, ainsi, se substituer aux batteries, notamment pour les énergies renouvelables. De même, l'hydroélectricité sert de stockage à certains moments. Il faut saisir tous les moyens de diversifier l'utilisation des énergies décarbonées – lorsqu'il est issu de l'électrolyse, l'hydrogène est totalement décarboné.
Hier encore, nous avons parlé de ces questions avec les constructeurs automobiles. Le Président de la République est, lui aussi, très engagé pour que l'on développe la recherche au sujet de cette énergie et les usages qui en sont faits. D'ailleurs, au-delà des laboratoires, il existe déjà des démonstrateurs, notamment dans le domaine des transports : il s'agit là de perspectives tout à fait intéressantes.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour la réplique.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le ministre d'État, vous connaissez peu notre groupe, et pour cause, vous êtes issu de l'Assemblée nationale, où le groupe du RDSE n'a pas d'équivalent ! (M. le ministre d'État sourit.) Mais vous allez nous connaître, et vous pourrez voir que, au RDSE, nous sommes très attachés au nucléaire.
M. Ronan Dantec. Pas tous ! Pas tous ! (Sourires.)
M. Jean-Claude Requier. Nous sommes pro-nucléaires – en tout cas, une grande partie du groupe : l'un d'entre nous, présent derrière moi, est arrivé ensuite... (Nouveaux sourires.)
Nous sommes attachés au nucléaire,… (M. Ronan Dantec fait des gestes de dénégation.)
Mme Sophie Primas. Il faut choisir son groupe, camarade ! (Sourires sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Claude Requier. … en majorité, mais, comme vous le voyez, nous n'en sommes pas moins très ouverts aux énergies renouvelables. (M. Daniel Chasseing applaudit.)