Mme Annick Girardin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous achevons aujourd'hui une intense séquence outre-mer par ce débat, pour l'organisation duquel je remercie le groupe RDPI et dont l'intitulé témoigne de la véritable urgence dans laquelle se trouvent nos territoires.
[embed=videolink]{"video":" https://videos.senat.fr/senat/2023/12/encoder1_20231214141515_1_2263000_2609000.mp4 ","width":"400","height":"225","nocookie":"0"}[/embed]
Le mois écoulé avait tout d'une course : lancement de la délégation sénatoriale aux outre-mer suivi de ses réunions et auditions, journée, voire semaine des maires ultramarins dans le cadre du congrès des maires, multiples entretiens de suivi des décisions du comité interministériel des outre-mer du 18 juillet 2023 que vous avez conduits, monsieur le ministre, territoire par territoire, sujets relatifs à l'outre-mer du projet de loi de financement de la sécurité sociale ou encore mission « Outre-mer » du projet de loi de finances.
Ce rythme de reprise intense n'est pas neutre : il est révélateur d'une conviction pour répondre aux attentes de nos territoires et de leur population.
Cependant, ne confondons pas vitesse et précipitation. J'irai même plus loin : permettons-nous de digérer les réponses du Gouvernement lors de ces séquences successives et mettons-nous à l'action dans les territoires.
Je ne suis pas certaine que cette concentration de rendez-vous ait été suffisamment visible et compréhensible par nos concitoyens. Nous avons sans doute, en la matière, un travail local de pédagogie à mener, avec votre aide, monsieur le ministre.
Sous la pression, nous avons même, mes chers collègues, réussi à oublier l'union indispensable sur les sujets essentiels qui concernent nos territoires. N'oublions pas que c'est dans la coordination que nous tirerons le meilleur de notre travail et de nos efforts.
Nous avons à présent besoin de temps, d'échanges, d'actions sur le terrain, de coconstructions et de solutions nouvelles pour relever nos grands défis communs, même si beaucoup a été fait et même si des moyens importants ont été mobilisés.
Le premier défi est le défi climatique et énergétique. Il nous faut construire des territoires « bas carbone », résilients face au changement climatique et aux risques naturels, construire des sociétés économes préservant les ressources et protégeant les populations face aux pollutions et aux substances chimiques.
Le deuxième défi est social. Nous voulons des sociétés inclusives, luttant contre toutes les formes d'exclusion et répondant aux besoins de logement et de ressources pour les ultramarins.
Le troisième défi est celui du développement économique et solidaire et de la lutte contre la vie chère.
Enfin, le quatrième et dernier défi est celui de la démographie. Certains territoires – les Antilles, Saint-Pierre-et-Miquelon – subissent une baisse constante de leur population, quand d'autres – Mayotte, la Guyane – sont confrontés à une surpopulation irrégulière.
En parallèle, nous devons ouvrir deux grands chantiers. Vous les avez rappelés, monsieur le ministre, ou du moins vous nous avez proposé une méthode de travail.
Je veux évoquer la question institutionnelle. Après l'appel de Fort-de-France du 17 mai 2022, lancé à l'issue du second tour l'élection présidentielle, il nous faut travailler sur les réponses que nous voulons y apporter.
Après les articles 73 et 74 de la Constitution, faut-il des articles bis ? Faut-il une réponse unique, une base commune ? Faut-il prendre en compte les spécificités des territoires ? J'ignore quelles seront les réponses, mais je suis convaincue que, pour les trouver, nous devons apprendre à sortir du cadre.
Sortir du cadre, pour Saint-Martin, ne serait-ce pas, à la veille des élections européennes, la possibilité de travailler davantage avec Sint Maarten ou peut-être, pour l'Union européenne, de prévoir un statut pour ces deux territoires partageant une même île ?
Sortir du cadre, pour Mayotte, ne serait-ce pas travailler à un hôpital extraterritorial ?
Cette solution a souvent été rejetée. Elle permettrait pourtant un double état-civil dans un même établissement. Nous pourrions jouer ainsi notre rôle d'assistance dans la région, tout en répondant au problème de la surpopulation à Mayotte.
En matière de défiscalisation, il nous faut là aussi évaluer les outils existants et reconnaître les abus. De toute évidence, un renforcement des contrôles est nécessaire, à tous les niveaux, mais il faut aussi que nous développions de nouveaux outils.
Vous avez cité les voies de développement économique nouvelles, monsieur le ministre. Construisons ce monde plus juste, plus équitable et plus durable grâce à cet outil de défiscalisation. Je souhaite que nous puissions, tous ensemble, y travailler.
Prenons le temps de coévaluer pour mieux coconstruire, comme l'a voulu, me semble-t-il, le Président de la République depuis sa première élection.
Certes, cette remarque est facile à formuler depuis notre place que depuis la vôtre – nous disposons d'un peu plus de temps et de recul que vous pour réfléchir à ces questions, monsieur le ministre –, mais retournons-nous sur les Assises des outre-mer et sur leur Livre bleu, sur le plan pour l'avenir de Mayotte, sur la démarche du « Oudinot du pouvoir d'achat » ou encore sur les mesures du Ciom.
Regardons ce qui a été concrétisé, mais surtout, interrogeons-nous sur ce qui a été abandonné et sur les raisons qui nous ont poussés à le faire. Souvent, celles-ci sont d'ordre territorial ou financier.
Ce travail de transparence est important, si nous voulons ensuite construire ensemble. Moi aussi, je revendique l'intelligence collective qui nous caractérise depuis quelques années déjà.
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue !
Mme Annick Girardin. Monsieur le ministre, je n'ai pas de question spécifique concernant Saint-Pierre-et-Miquelon. Vous en revenez et vous connaissez mes priorités.
Nous continuerons à travailler ensemble. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et RDPI. – Mmes Viviane Malet et Annick Petrus applaudissent également.)