Mme Guylène Pantel. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l'examen du projet de loi de finances pour 2022 aurait pu offrir au Parlement l'occasion de dresser un bilan de la politique d'aménagement du territoire du quinquennat. Je regrette que nous n'ayons pu discuter de la deuxième partie de ce budget, en dépit – nous en sommes conscients – de notre marge de manœuvre limitée.
Sans revenir sur le Congrès des maires, il me semble primordial de rappeler que la confiance entre l'État et les collectivités repose, d'abord, sur la clarté et la stabilité de la norme, ensuite, sur la péréquation entre les territoires pour garantir la solidarité nationale, enfin, sur l'accompagnement humain, juridique et financier pour les territoires les plus défavorisés.
C'est sur ce dernier point qu'il nous semble important d'insister.
S'agissant de l'administration déconcentrée, nous connaîtrons pour la première fois, à la veille des échéances électorales, une progression des effectifs de l'État à l'échelon des départements, après une diminution constante depuis 2007… Le groupe du RDSE s'en réjouit vivement. L'aide complémentaire que pourront apporter les volontaires territoriaux en administration est bienvenue, mais nous avons avant tout besoin de postes pérennes.
Malheureusement, le projet de loi de finances pour 2022 n'épargne pas le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement, le Cerema, qui subit une hémorragie de ses effectifs : 700 postes supprimés en sept ans ! Cela défie toute logique, alors que son expertise est précieuse au regard de l'ensemble des enjeux d'aménagement du territoire et qu'il existe une véritable carence d'ingénierie au sein d'un grand nombre de collectivités. Cette cure d'austérité doit cesser.
Comme vous le savez, madame la ministre, le groupe du RDSE a promu la création, voilà deux ans, de l'Agence nationale de la cohésion des territoires, qui monte progressivement en puissance. Cela ne va pas assez vite et il faut comprendre l'impatience des élus après des décennies d'abandon de la politique d'aménagement du territoire et de la priorité octroyée aux métropoles, qui ont ainsi pu concentrer les richesses, les emplois et les services.
Si l'on progresse enfin vers une logique de guichet unique et le décloisonnement des services administratifs de l'État, un effort particulier sur l'ingénierie territoriale reste à fournir. Or l'enveloppe budgétaire consacrée aux projets « sur-mesure » des collectivités se situe bien en deçà de l'effort qu'il serait indispensable de fournir pour alimenter une véritable politique de cohésion des territoires, au profit des plus prioritaires d'entre eux. La somme de 20 millions d'euros ne peut nous satisfaire, sachant qu'elle correspond à un total de 750 projets en 2021 et qu'environ la moitié de cette enveloppe est en réalité dédiée à des prestations réalisées par le privé.
La création de l'ANCT avait également pour objectif de mettre un terme à la concurrence entre les territoires par le recours aux appels à projets. Nous ne nions pas l'intérêt des programmes menés par l'État, mais ils excluent encore les collectivités n'ayant pas les ressources pour y répondre et monter les dossiers.
En définitive, nous faisons mieux – ce qui est déjà une bonne nouvelle –, mais à moyens constants – ce qui ne permet pas de rattraper les effets du retrait de l'État.
Enfin, je tiens à souligner que, sur le terrain, nous constatons des problèmes de cohérence quant à l'identification des territoires bénéficiaires de certains programmes d'État offrant un accompagnement en ingénierie.
En Occitanie, par exemple, seules 225 communes ont été labellisées dans le cadre du programme Petites Villes de demain. La région a mis en place des contrats Bourgs-Centres dès 2017, qui concernent toutes les communes ayant des charges de centralité, à savoir les communes dites pôles de services supérieurs et intermédiaires, celles de plus de 1 500 habitants possédant une fonction de pôle de services de proximité et celles de moins de 1 500 habitants, souvent d'anciens chefs-lieux de canton, qui offrent des services essentiels auprès des zones rurales de faible densité démographique. Cela représente en tout 501 communes. Que fait-on des oubliés de l'action territorialisée de l'État ?
Nous appelons donc à plus de lisibilité quant à l'identification des bénéficiaires de ces programmes et à une déconcentration et un renforcement des moyens de l'ANCT, notamment sur le terrain, pour soutenir les collectivités qui en ont le plus besoin dans l'exercice de leurs compétences.
Madame la ministre, les collectivités territoriales n'attentent de l'État qu'un accompagnement effectif, leur permettant de maintenir des bassins de vie, de faciliter l'accès aux services publics, de concrétiser leur droit à se développer – en somme, l'équité et la cohésion territoriale ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)