Mme Nathalie Delattre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de l'examen de ce projet de loi, on ne peut que constater que ce projet de loi, avec ses propositions initiales comme avec les apports importants du Sénat, au regard des dispositions tant programmatiques que normatives, va dans la bonne direction.
Je veux saluer le travail des deux rapporteurs et l'investissement du ministre, au travers des explications qu'il a apportées.
Je ne reprendrai pas les thèmes du sommaire du rapport, qui aborde un certain nombre de sujets sur lesquels nos forces de sécurité publique attendaient des développements et un soutien matériel, technique, numérique et juridique.
Notre assemblée a su défendre d'autres sujets, comme, dans le cas de notre groupe, celui de l'accessibilité des personnes en situation de handicap. Je me réjouis de l'adoption de plusieurs amendements de notre collègue Maryse Carrère.
Je me félicite également de la perspective budgétaire. L'augmentation annoncée semble à la hauteur des enjeux de sécurité publique auxquels notre pays est et sera confronté. Pour autant, il faut que ces moyens soient déployés à bon escient. Je pense notamment à la formation : les carences en la matière ne sont plus à démontrer, surtout en ce qui concerne la formation continue. Le rapport annexé évoque la formation tant en matière numérique que pour les métiers de terrain. J'espère donc qu'il sera suivi d'effet, d'autant que l'article 9 supprime les trois années de pratique pour devenir OPJ.
Je veux revenir également sur l'implantation de nouvelles casernes de gendarmerie. Pour assurer le maintien de l'ordre dans les territoires ruraux, chacun sait la nécessité d'implanter de nouvelles brigades, notamment dans les territoires qui connaissent une poussée démographique. Cela concerne la Gironde, monsieur le ministre, comme j'ai eu l'occasion de vous le dire durant nos échanges. Je serai donc attentive à ce point, et je sais que je ne serai pas la seule ; vous vous en doutez bien.
Au cours de nos travaux, nous avons pu aborder longuement certains aspects. Je pense en particulier à la réforme de la police nationale et, plus spécifiquement, aux problématiques liées à la police judiciaire. Nous avons été quelques-uns à relayer les inquiétudes des acteurs de terrain et des magistrats.
Notre assemblée a fait inscrire en dur dans la loi que la réforme devra « tenir compte des spécificités de la police judiciaire ». Vous avez eu, monsieur le ministre, des propos rassurants, notamment sur la question de l'indépendance des magistrats dans la direction de l'instruction. Nous espérons que ces engagements permettront de réformer sereinement notre police. Car oui, l'évolution de cette dernière est nécessaire !
Les travaux menés pour cadrer l'usage de l'amende forfaitaire étaient aussi bienvenus. Le projet initial soulevait des inquiétudes en raison de son caractère très général. La rédaction par nos rapporteurs de l'article 14, qui limite strictement le champ d'application du dispositif, est, là aussi, de nature à nous rassurer. L'amendement du Gouvernement adopté en séance a complété le dispositif. La solution retenue me paraît plus sage au regard des principes qui gouvernent notre justice.
L'une des innovations du texte soulève néanmoins des interrogations : il s'agit de la création de la nouvelle fonction d'assistant d'enquête. L'analogie avec les greffiers est séduisante, mais elle présente aussi son lot de questionnements. Comment seront-ils formés et encadrés ? Comment seront-ils rémunérés ? Comment seront-ils répartis ? Comment seront-ils contrôlés ? Des échanges ont eu lieu en séance ; je ne crois pas qu'il faille renoncer à l'institution de ces nouveaux personnels, mais il faudra veiller à la manière dont ils seront mis en place.
Au terme de nos échanges, il reste cependant quelques sujets d'interrogation, voire quelques regrets.
Notre collègue Roger Karoutchi l'a évoqué très justement dès la discussion générale : la police et la justice se plaignent souvent l'une de l'autre, au point parfois de s'opposer, alors qu'il y aurait lieu de les penser ensemble.
M. Roger Karoutchi. C'est vrai !
Mme Nathalie Delattre. De ce point de vue, ce texte donne le sentiment d'une occasion manquée, un sentiment largement renforcé par la manière dont les irrecevabilités ont été appliquées à nos amendements.
J'en veux pour exemple un amendement que j'avais déposé et qui tendait à reprendre les dispositions de ma proposition de loi visant à permettre aux différentes associations d'élus de se constituer partie civile pour soutenir pleinement, au pénal, un édile victime d'agression. Cet amendement a été déclaré irrecevable, car ne s'inscrivant pas dans le périmètre de la loi. Je comprends évidemment le raisonnement qui a conduit à une telle décision dès lors que nous n'examinons pas un texte touchant à la question du procès. Mais nous voyons aussi la limite de l'exercice qu'aura représenté cette loi de programmation. D'un côté, nous adoptons un article 7 bis qui vise à renforcer la protection pénale des élus. De l'autre, nous ne pouvons pas examiner d'autres dispositifs ayant la même finalité, au motif qu'il y serait question de l'organisation du procès, domaine relevant du ministère de la justice, et non de l'intérieur.
Ce cloisonnement d'ordre quasi administratif est regrettable. Il a d'ailleurs parfois mené à des confusions sur d'autres débats également importants. Mais il est vrai qu'une partie importante des articles du projet de loi initialement déposé au mois de mars dernier n'ont pas été retenus dans la version finale qui nous a été présentée ; je pense notamment à un important volet sur la justice.
Cette loi de programmation n'est qu'une première étape. Nous attendons beaucoup des prochains textes qui devraient nous être présentés – nous l'espérons ! – rapidement.
Dans cette attente, notre groupe, dans sa grande majorité, se prononcera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe RDPI et au banc de la commission.)