M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la contribution de la France au budget de l’Union européenne, objet de l’article 36, s’impose à nous, puisqu’elle est la traduction de notre engagement communautaire, auquel mon groupe est historiquement très attaché.
Le montant proposé pour 2020, de l’ordre de 21,3 milliards d’euros, relativement stable par rapport à 2019, est globalement satisfaisant, compte tenu des contraintes qui pèsent sur nos finances publiques.
J’émettrai une première interrogation, devenue incontournable depuis quelques mois : quel sera l’impact de l’interminable feuilleton britannique du Brexit ? C’est une question que nous avons souvent évoquée ici. Aujourd’hui, nous sommes, hélas, toujours dans l’incertitude, tant nos amis Britanniques peinent à franchir le Rubicon ou, devrais-je plutôt dire, peinent à fermer la Manche… (Sourires.)
Ce que l’on sait, c’est que la non-participation du Royaume-Uni au budget de l’Union européenne pour 2020, du fait d’une sortie sans accord, alourdirait la contribution française de 1 milliard à 2 milliards d’euros. La Commission européenne envisage un plan de coupes budgétaires, que vous avez raison de contester, madame la secrétaire d’État, car le Brexit ne doit pas conduire à bâtir une Europe au rabais, alors même qu’un départ britannique non négocié pourrait nous coûter 0,5 point de croissance.
Par conséquent, espérons que les Britanniques, réputés en rugby pour leur fair-play, quand ils veulent bien en faire preuve (Sourires.), s’acquitteront de leurs obligations financières, comme ils l’ont promis en 2017, l’accord d’octobre dernier n’ayant pas remis ce point en question.
Ma deuxième remarque concerne les fonds européens, qui conditionnent également le niveau du prélèvement sur recettes reversé à l’Union européenne. Comme l’a souligné notre collègue rapporteur spécial, le rythme de consommation des crédits de la politique de cohésion n’est pas assez soutenu.
Parmi les causes identifiées de ce phénomène, on peut citer un retard accumulé dans la mise en œuvre de la politique de cohésion au début de la programmation. Ce fut déjà le cas avec le cadre financier pluriannuel 2007-2013 ; l’exécution budgétaire de l’année 2013 avait fait un bond de deux milliards d’euros par rapport à la prévision initiale. En 2020, nous serons également en fin de programmation pluriannuelle. Allons-nous connaître le même scénario ?
Quoi qu’il en soit, afin d’éviter ce décalage chronique, la réforme de simplification des fonds de cohésion proposée par la Commission doit intervenir au plus tôt. Les procédures de contrôle sont trop lourdes ; il faut les alléger. Mon groupe y est favorable, car nous souhaitons que ces fonds soient optimisés, pour qu’ils profitent pleinement à nos territoires.
Concernant la structure des ressources propres, le groupe du RDSE partage le principe défendu par la Commission de les voir complétées et modernisées. Cela pourrait permettre, d’une part, de combler le manque à gagner lié au Brexit, et, d’autre part, d’alléger la part des contributions du revenu national brut qui constitue près de 70 % des recettes totales.
Dans cette perspective, je soutiens le principe d’une assiette commune consolidée de l’impôt sur les sociétés, ressource qui serait prélevée en contrepartie des avantages procurés par le marché unique. Hélas, la règle de l’unanimité au Conseil de l’Union européenne bloque toujours cette proposition.
Mon groupe est également très attentif au projet de taxe sur les services numériques, dévoilé par la Commission en 2018. La France est en pointe avec la taxe nationale que nous avons adoptée cet été, mais notre pays est quelque peu isolé au regard de l’enjeu économique. Dans ces conditions, un accord européen serait le bienvenu.
Enfin, mes chers collègues, comme vous le savez, l’exercice 2020 constitue le dernier du cadre pluriannuel en cours. Aussi, je souhaite terminer mon intervention, en évoquant le prochain cadre 2021-2027, qui traduira les nouvelles priorités de l’Union européenne.
Sans vouloir opposer ces nouvelles priorités aux anciennes, vous ne serez pas surprise, madame la secrétaire d’État, que je souligne mon attachement à la PAC et au maintien des moyens de cette dernière.
Chacun le sait, on demande toujours plus aux agriculteurs ! Ainsi, ce ne sont pas moins de vingt et un alinéas qui définissent les finalités de l’agriculture à l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime : produire, bien sûr, mais aussi protéger les terres, aménager les territoires, garantir l’indépendance alimentaire, assurer la transition écologique, etc. La liste des missions qui incombent à nos agriculteurs à travers nos politiques publiques est longue, et tout cela dans un contexte de plus en plus concurrentiel.
Par conséquent, une baisse de 3 % en valeur des crédits de la PAC serait inacceptable. Au Sénat, le consensus est assez large, je le crois, sur cette attente. Mon groupe sera en tout cas particulièrement vigilant sur ce point, comme il l’a toujours été dès lors qu’il s’est agi d’œuvrer pour le renforcement de l’intégration européenne au bénéfice de nos concitoyens.
Nous voterons la contribution au budget de l’Union européenne prévue à l’article 36 du projet de loi de finances. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – MM. André Gattolin et Simon Sutour applaudissent également.)