M. le président. La parole est à Mme Mireille Jouve. (MM. Jean-Yves Roux, Michel Laugier et Mme Sylvie Goy-Chavent applaudissent.)
Mme Mireille Jouve. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, depuis plusieurs années, le sport demeure le parent pauvre du budget de l'État.
Force est pourtant de constater que le financement du sport dans notre pays repose sur des ressources particulièrement dynamiques.
La taxe sur la cession des droits télévisés d'événements sportifs, dite taxe « Buffet », verra son rendement encore augmenter de 25 millions d'euros d'ici à 2021. Le produit de la taxe sur les paris sportifs a, quant à lui, été majoré de 80 % depuis 2015. Ces financements sont issus du sport professionnel et nous connaissons toutes et tous la frénésie financière qui s'est emparée du sport-business. Celle-ci, hermétique à toutes les conjonctures économiques, connaît une croissance aussi constante que soutenue année après année.
Quel contraste avec le vieillissement que subissent un grand nombre de nos infrastructures sportives au sein de nos territoires ! Quel contraste avec la baisse des moyens à laquelle se sont heurtées nos associations sportives locales ces dernières années !
Aussi, les membres du groupe du RDSE, à l'instar de nombre de nos collègues sur ces travées, appellent à un rééquilibrage de l'affectation du produit des taxes destinées au financement du sport, afin qu'il bénéficie plus largement au sport amateur.
En effet, le dynamisme de ces ressources fiscales ne doit pas uniquement servir à abonder le budget général de l'État. La solidarité entre sport professionnel et sport amateur doit s'exprimer plus clairement en matière budgétaire.
Nous pourrions le faire d'autant plus aisément que, compte tenu des ressources croissantes générées chaque année, ce soutien accru au sport dans les territoires pourrait être accordé sans pénaliser outre mesure le budget de l'État.
Nous appelons de nos vœux ce rééquilibrage, car le projet de budget qui nous est proposé n'apporte aucune réponse nouvelle à cet égard.
Si les crédits de la mission sont en hausse, c'est parce qu'ils traduisent le respect de nos engagements financiers dans le cadre des Jeux d'été de la XXXIIIe Olympiade de l'ère moderne.
À la lecture des chiffres figurant dans ce projet de loi de finances, certains pourraient même interpréter l'insuffisance des moyens alloués au sport amateur comme un effet d'éviction qui bénéficierait aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
Nous le savons tous, il s'agit justement de l'écueil à éviter lorsque l'on organise de telles manifestations, à l'égard desquelles l'opinion publique n'est plus nécessairement aussi enthousiaste qu'auparavant.
Un tel message serait désastreux, alors que nous attendons justement de ces Jeux qu'ils soient un moteur pour encourager la pratique sportive amateur dans notre pays.
Le Gouvernement a fixé un objectif ambitieux de 3 millions de pratiquants supplémentaires. Pour ce faire, il faut doter plus généreusement nos territoires et les acteurs locaux du sport.
Dans le cadre de sa réforme de la gouvernance du sport et de la création de l'Agence nationale du sport, l'exécutif attend du secteur privé qu'il participe plus largement au financement du sport. En réalité, nous n'avons aucune certitude pour le moment sur un tel engagement futur.
En revanche, le désengagement de l'État en matière sportive, lui, prend chaque jour une forme beaucoup plus concrète. Nos inquiétudes demeurent vives sur notre capacité, dans les prochaines années, à mettre en œuvre une véritable politique publique du sport en France.
Et l'on en vient à penser que la prochaine dilution du ministère des sports au sein du ministère de l'éducation nationale n'est pas forcément une fable, lorsque l'on constate le transfert des personnels des directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS) et des directions départementales de la cohésion sociale (DDCS) vers celui-ci.
Ce transfert fait craindre un affaiblissement des missions précédemment exercées par ces agents et un redéploiement de ces derniers au bénéfice du service national universel : un SNU appelé de ses vœux par le Président de la République et qui bénéficie d'une attention particulière de la part de l'exécutif.
J'en viens aux crédits dévolus au programme « Jeunesse et vie associative ».
Nous avons pris connaissance des nouveaux moyens mobilisés pour la montée en puissance du SNU. Nous souhaitons toutefois rappeler notre attachement au dispositif du service civique, dont la pertinence ne fait l'objet d'aucune contestation. Le ralentissement très significatif des financements dédiés à ce dispositif nous fait craindre une réduction de la durée des missions afin de pouvoir toujours répondre à un nombre important de demandes.
Nous rappelons que le déploiement du SNU ne doit pas pénaliser outre mesure la poursuite de la mise en œuvre du service civique avec l'ambition qui a été la sienne jusqu'ici.
De nombreuses zones d'ombre continuent d'ailleurs d'entourer l'avenir de ce dispositif. Nous attendons des éléments de réponse concernant la mobilisation et la répartition des places d'accueil, ou encore sur la question de l'encadrement et de la formation des encadrants.
Au regard des lourds moyens financiers que le SNU devrait mobiliser dans l'avenir, sa redondance avec de nombreux dispositifs existants est en outre souvent pointée du doigt.
Au-delà de ces griefs, nous sommes conscients du fait que ce projet de loi de finances, même s'il n'est pas porteur de ressources nouvelles pour le développement du sport dans nos territoires, a au moins le mérite de stopper l'hémorragie observée ces deux dernières années dans ce domaine. Il est également porteur du respect de nos engagements financiers en vue des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris.
Aussi, compte tenu de ces éléments, le groupe du RDSE s'abstiendra sur le vote des crédits de cette mission. (M. Jean-Yves Roux applaudit.)