M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la période durant laquelle nous examinons ce quatrième PLFR de l'année est de nouveau préoccupante, sur le plan tant sanitaire qu'économique.
Alors qu'après le premier confinement l'activité économique avait enregistré une chute inédite depuis la Seconde Guerre mondiale, elle a connu un fort rebond pendant l'été. Toutefois, c'est aussi à ce moment-là que les contaminations ont commencé à reprendre, avec la liberté retrouvée, mais une vigilance que l'on sait désormais insuffisante, car trop rapidement relâchée.
Nous nous trouvons donc, une nouvelle fois, en ce mois de novembre, dans une zone de récession et de fortes turbulences. À ce rythme, il devient parfois difficile de suivre l'évolution des prévisions macroéconomiques, tant elles sont devenues changeantes et fragiles. Celles qui figurent dans le PLF pour 2021 sont déjà en partie caduques. Depuis le printemps dernier, l'Insee a même dû augmenter la fréquence de ses publications pour rendre compte plus fidèlement de l'évolution de la conjoncture.
Le premier PLFR, qui a instauré les différents dispositifs de soutien d'urgence, a été voté conforme au Sénat, dès la fin du mois de mars 2020. Un mois plus tard, en avril dernier, le deuxième PLFR a très fortement accru le champ des dispositions et augmenté le déficit public dans des proportions inédites, alors que l'on prenait conscience de l'ampleur du choc entraîné par les mesures sanitaires.
Enfin, le troisième PLFR, qui a été examiné et adopté en juillet dernier, faisait déjà figure de « pré-PLF », avec plus de mille amendements déposés dans cette assemblée.
Ce quatrième projet de budget rectificatif ne modifie pas sensiblement le montant du déficit de 2020, déjà abyssal, il est vrai. Il prévoit des mesures budgétaires complémentaires, ainsi que des ajustements. Les prévisions sont plus pessimistes que dans le PLF 2021, alors qu'on aurait pu espérer une fin d'année moins défavorable. La récession atteindrait ainsi 11 % du PIB, et le déficit public 11,3 %, soit 223 milliards d'euros !
Parmi les principales mesures de ce PLFR, figure le relèvement important des crédits alloués au fonds de solidarité aux petites et moyennes entreprises. Avec près de 11 milliards d'euros supplémentaires, son montant fait plus que doubler, pour atteindre les 20 milliards d'euros en tout. Bien qu'indispensable, on ne sait pas si cette rallonge sera suffisante.
Le soutien à l'activité partielle reste le principal dispositif du plan d'urgence, dont il représente désormais quasiment la moitié des crédits, avec 34 milliards d'euros.
Par ailleurs, le plan d'urgence comporte des mesures qui relèvent des finances sociales qu'il s'agisse de nouvelles exonérations de cotisations ou de provisions pour face faire à la hausse des dépenses d'assurance maladie et d'assurance chômage.
Il convient de noter que l'article 9 rehausse de plus de 1 000 ETP le plafond d'effectifs des opérateurs de l'État, en particulier ceux de Pôle emploi. En effet, le service public de l'emploi est déjà, et risque d'être de plus en plus sollicité dans les semaines et les mois qui viennent, en raison de la hausse inéluctable du chômage.
La « bonne nouvelle » de ce PLFR, c'est que la vingtaine de milliards d'euros de nouvelles dépenses qui sont engagées pour financer le plan d'urgence seront compensées par des recettes supplémentaires, notamment les rentrées fiscales enregistrées pendant l'été. On peut donc dire que la dernière « tranche » des mesures de soutien ne devrait pas être financée par la dette: Il est vrai qu'en comparaison des déficits des deuxième et troisième lois de finances rectificatives, respectivement à 70 milliards et à 50 milliards d'euros, cela reste une consolation modeste.
Gardons la mesure des ordres de grandeur en jeu : à la fin de l'année 2018, les dispositions liées à la crise des gilets jaunes n'avaient coûté « qu'une dizaine » de milliards d'euros. Cette année, pour faire face à la crise sanitaire, on parle de près de 130 milliards d'euros de déficit supplémentaire ! Depuis qu'au printemps dernier la Commission européenne a suspendu les règles du Pacte de stabilité, nous sommes bien dans un contexte exceptionnel.
De nombreuses questions demeurent, en particulier sur notre capacité à surmonter collectivement cette crise sanitaire et économique, à moyen et long termes. Même si un rebond économique devrait avoir lieu en 2021, l'expérience de cette deuxième vague démontre que, tant qu'une solution durable – vaccin ou autre – n'aura pas été trouvée contre l'épidémie, nous ne serons pas à l'abri de nouvelles recrudescences des contaminations et de nouvelles restrictions pour y faire face.
En conclusion, après ces quelques remarques, et compte tenu des nombreux amendements qui ont été déposés sur ce texte, j'indique que les membres du groupe RDSE détermineront leur vote à l'issue des débats.