Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, compte tenu des blocages visiblement irréductibles sur ce texte et de son adoption sans modification par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, mon intervention différera peu de celle que j’ai faite au cours de la première lecture.
Ce projet de loi de règlement des comptes de l’État de 2019 est désormais, comme nous l’avons dit, issu d’un autre monde, au regard de la situation inédite dans laquelle nous sommes plongés depuis l’émergence du virus SARS-CoV-2, situation face à laquelle nous devons continuer de suivre des mesures strictes de sécurité sanitaire, comme le port du masque dans les lieux clos.
Les propos nuancés et rassurants que l’on pouvait tenir l’an dernier quant aux perspectives de rééquilibrage et de redressement progressif des finances publiques ne sont hélas plus de mise.
Depuis la fin de mars dernier, l’Insee publie des points de conjoncture à échéances rapprochées, toutes les deux à trois semaines.
Le dernier point, publié le 8 juillet, a confirmé une chute d’activité de 17 % au deuxième trimestre de cette année, au lieu des 20 % précédemment estimés. Les créations d’entreprises ont néanmoins bondi de 60 % en mai. Enfin, l’Insee fait état d’une récession de 9 %, et non de 11 %, pour l’ensemble de 2020. Ce résultat, encore incertain, avait tempéré, modestement il est vrai, les prévisions les plus pessimistes.
Nous attendons donc avec une certaine impatience – pour ne pas dire une certaine inquiétude – le prochain point de conjoncture, qui doit être publié avant la fin du mois.
La principale bonne nouvelle du projet de loi de règlement est le déficit finalement contenu à 3 % en 2019.
M. Philippe Dallier. Si c’est ça la bonne nouvelle…
M. Jean-Claude Requier. Pourtant, les mesures à hauteur de 17 milliards d’euros prises pendant le mouvement des « gilets jaunes », en particulier la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, avaient fait craindre un nouveau dérapage des finances publiques. In fine, le solde 2019 est donc relativement fidèle à la loi de programmation de 2017, ce qui mérite d’être souligné.
De même, l’endettement s’était stabilisé autour de 98 % du PIB, et, pour la première fois depuis longtemps, on a constaté une baisse de la part de la dépense publique dans la richesse nationale, ainsi que du taux de prélèvements obligatoires.
Ces bons résultats sont dus en partie aux recettes perçues grâce aux fameuses primes d’émission sur la dette, dont j’ai parlé en détail en première lecture.
Certes, la réduction du déficit structurel aurait dû être plus importante. Il faut dire que le pilotage des dépenses de l’État est d’une extrême complexité et pas toujours d’une grande lisibilité, compte tenu des masses financières en jeu et de la multiplicité des administrations.
Par rapport au budget initial, certains crédits ont été revus à la hausse, comme ceux alloués à l’aide publique au développement, en hausse de 1 milliard d’euros, signe de l’importance accordée à cette politique publique et traduction de l’engagement présidentiel d’augmenter sa part dans la richesse nationale.
L’enseignement scolaire est, de loin, le premier poste de dépense, avec plus de 70 milliards d’euros de crédits. Si l’on exclut le paiement des intérêts de la dette, la défense arrive en deuxième position, avec une dotation fortement rehaussée depuis le début de ce quinquennat.
De façon générale, les grands périmètres budgétaires de l’État évoluent peu, ce qui traduit peut-être une difficulté à redéfinir, rationaliser et redéployer certaines de ses missions. La nouveauté de cette année est, bien sûr, le plan d’urgence de soutien à l’activité, dont nous avons voté la troisième extension avant-hier matin.
Toutefois, la maîtrise des dépenses s’est améliorée, grâce à des économies de gestion de l’ordre de 1 milliard d’euros. Cette bonne gestion permet d’afficher un déficit public à seulement, si je puis dire, 92,7 milliards d’euros, soit 15 milliards de mieux que dans la loi de finances initiale. Il aurait peut-être été encore plus faible sans le basculement complet du CICE en baisse de cotisations sociales.
Les objectifs de performance instaurés par la LOLF semblent atteints dans 50 % à 60 % des cas, ce qui est difficile à interpréter…
Enfin, je tiens à souligner la bonne tenue des comptes des collectivités territoriales. Depuis 2018, elles ont pleinement joué le jeu de la contractualisation et contenu leurs dépenses de fonctionnement. Elles ont joué un rôle essentiel d’acteurs de proximité dans la crise sanitaire, en commandant et en assurant l’approvisionnement en équipements de protection – masques et gels, notamment.
Certes, ces bons résultats globaux cachent des disparités importantes entre les territoires – la grande réforme de la péréquation reste à mener… Ils n’en méritent pas moins d’être soulignés, alors que nous sortons d’un cycle électoral compliqué, avec le report de plus de trois mois du second tour des élections municipales, et que certaines collectivités territoriales feront état d’une situation financière difficile cette année, compte tenu des effets de la crise.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, l’exercice budgétaire 2019 restera un moment de gestion améliorée des deniers publics. Espérons qu’il nous aidera à affronter le défi inédit qui est aujourd’hui devant nous !
Le groupe du RDSE votera majoritairement le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2019. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)