Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Artano, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (M. Jean-Claude Requier applaudit.)[embed=videolink]
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M. Stéphane Artano. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis a pour objet de réguler les relations sociales entre les plateformes numériques et les travailleurs indépendants.
Il est vrai que l'émergence de ces plateformes et, avec elle, l'apparition d'une nouvelle organisation du travail, nous amènent à nous interroger, notamment, sur le statut de ces travailleurs ou sur leurs droits sociaux. En somme, nous devons désormais prendre en compte le modèle économique de ces plateformes, afin de mieux protéger et de garantir suffisamment les droits des travailleurs qui y ont recours.
Le débat sur la détermination du cadre des rapports entre les plateformes numériques et les travailleurs ayant opté pour la microentreprise n'est pas nouveau. En effet, le législateur a déjà fait œuvre de régulation à plusieurs reprises, afin de rétablir un équilibre dans les relations qui lient ces travailleurs indépendants aux plateformes numériques.
Nos travaux s'inscrivent donc dans le prolongement de la loi du 8 août 2016, dite « loi El Khomri », complétée par la loi d'orientation des mobilités (LOM) du 24 décembre 2019. La première pose les fondements de la responsabilité sociale de ces plateformes, tandis que la seconde établit une charte déterminant les droits et les obligations des plateformes, ainsi que ceux des travailleurs avec lesquels elles sont en relation.
Dans la continuité de ces textes, et sans remettre en cause les statuts existants, le présent projet de loi a pour ambition de renforcer les droits des travailleurs indépendants, en permettant notamment de faire émerger des garanties collectives en faveur des travailleurs des plateformes par la voie du dialogue social.
Avant de poursuivre, il convient de rappeler que le développement de ces plateformes numériques est généralement considéré comme l'opportunité d'exercer une activité professionnelle pour de jeunes travailleurs sans formation et n'ayant parfois aucune expérience du monde du travail.
L'ubérisation croissante d'une partie de notre mode vie, qui s'est accélérée avec la crise sanitaire, nous amène à réfléchir à notre modèle social, car tout laisse à croire que ce modèle économique s'étendra probablement à d'autres secteurs d'activité. Il est donc nécessaire et urgent de fixer un cadre légal clair pour éviter toute précarisation du travail.
Il est nécessaire de construire un dialogue social entre les plateformes et les travailleurs indépendants. Je partage le point de vue de M. le secrétaire d'État sur ce sujet.
C'est pourquoi, dans son rapport de mai 2020 sur le droit social applicable aux « travailleurs indépendants économiquement dépendants », la commission des affaires sociales du Sénat avait déjà formulé des recommandations, afin de dépasser le débat sur le statut de ces travailleurs et de développer leurs droits de manière pragmatique, notamment par la voie du dialogue social.
Dans ce contexte, la commission des affaires sociales est restée fidèle à ses propositions lors de la préparation de ce projet de loi. Je tiens aussi à féliciter tous nos collègues qui ont participé à la commission mixte paritaire de la qualité du travail effectué.
L'ordonnance du 21 avril 2021, que l'article 1er du projet de loi vise à ratifier, permet aux travailleurs indépendants des plateformes de mobilité de désigner leurs représentants pour 2022.
Par ailleurs, on ne peut que saluer la création d'une Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi (ARPE) : ce nouvel établissement public aura pour rôle de réguler les relations entre les deux parties.
Mes chers collègues, ces dispositions ne constituent qu'une première étape dans l'élaboration d'un cadre permettant le développement du dialogue social entre les travailleurs indépendants et les plateformes, lesquelles peuvent encore être améliorées, comme tout texte législatif. Certes, le cadre du dialogue est défini, mais certaines questions restent à régler : le salaire minimum, la protection contre les licenciements, les droits du licencié ou, enfin, la détermination de la durée maximale de travail.
En conclusion, malgré ces dernières observations, notre groupe votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)