By Sandra on jeudi 20 janvier 2022
Category: TRAVAIL PARLEMENTAIRE

Projet de loi relatif à la protection des enfants

Mme Nathalie Delattre. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les lois relatives à la protection de l’enfant de 2007 et de 2016 ont réaffirmé l’engagement de notre République concernant les droits et les besoins fondamentaux de l’enfant. Cette dynamique, qui s’inscrit dans un cheminement législatif entamé à la fin du XIXe siècle, nous conduit aujourd’hui à examiner un texte qui, selon notre groupe, permettra une meilleure prise en compte des besoins de l’enfant. Nous saluons donc le travail accompli en bonne intelligence par la commission mixte paritaire.

L’une des avancées majeures de ce projet de loi est l’interdiction totale d’héberger des mineurs dans des hôtels. Nous connaissons les limites et dangers de ce dispositif : les mineurs y sont proches des lieux de trafic et les éducateurs trop peu présents. En témoigne l’agression mortelle de Jess, un jeune homme de 17 ans placé dans un hôtel, par un autre jeune hébergé dans le même établissement.

Les avancées concrètes promises par ce dispositif sont toutefois limitées par la programmation de son entrée en vigueur, prévue dans deux ans. En attendant, je ne peux que saluer la limite d’accueil de deux mois introduite par la commission mixte paritaire.

Je me satisfais également qu’un pan de ce texte soit consacré à l’amélioration des garanties procédurales pour l’enfant en matière d’assistance éducative. Le texte instaure notamment la désignation par le juge d’un avocat pour l’enfant capable de discernement.

Je m’interroge cependant sur certaines notions : que signifie être capable de discernement ? Être mature ? Avoir conscience de sa propre volonté ? Être responsable ? Le droit à être entendu est un droit fondamental, qui ne peut être conditionné à ces définitions encore trop obscures.

Un enfant, quel que soit son âge, est en capacité d’exprimer à sa manière son bien-être ou son mal-être, en présence de la personne pressentie pour l’accueillir.

C’est pourquoi j’avais déposé un amendement tendant à supprimer la notion de discernement, car, mes chers collègues, la protection de l’enfance ne peut se penser sans l’inclusion effective des principaux intéressés.

Je salue également l’interdiction de séparer des fratries. De telles séparations, qui suscitent incertitude et instabilité chez les enfants, ont déjà fait bien des ravages.

La consolidation juridique du dispositif du week-end de répit pour les assistants familiaux est également de bon augure. Ces derniers, en effet, sont bien souvent confrontés à la réalité violente de la protection des enfants, enfants qu’il faut savoir accueillir et transformer sans tressaillir. L’équilibre psychique et la santé mentale des professionnels intervenant auprès des enfants ne peuvent donc être négligés.

Malgré toutes les avancées concrètes recensées, je ne peux m’empêcher de revenir sur les silences de ce projet de loi, sans pour autant remettre en cause son bien-fondé.

Une fois encore, je regrette que la question du suivi psychologique des enfants placés ne soit pas abordée. Il est inconcevable que des enfants témoignant d’une histoire difficile, souvent violente, ne soient pas suivis en bonne et due forme. Il est primordial de faciliter des processus de reconstruction psychique, lesquels restent encore trop chaotiques.

Enfin, je m’interroge sur la viabilité financière des mesures prévues par ce texte. Celles-ci sont satisfaisantes, mais je crains que la somme allouée par le Gouvernement ne soit insuffisante, ce qui créera une nouvelle charge insupportable pour les départements.

Pour autant, nous préférons, au groupe du RDSE, souligner les avancées de ce texte, qui traite humainement du sujet sensible et fondamental qu’est la protection de l’enfance. Nous voterons donc majoritairement ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, UC et Les Républicains.)