M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard. (M. Emmanuel Capus applaudit.)
M. Jacques Mézard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je rappellerai la position traditionnelle du groupe RDSE sur les fusions de communes et l'évolution de nos collectivités territoriales.
Le principe qui nous guide, c'est le respect de la liberté exprimée par les élus locaux. Tel ne fut pas le cas avec la loi NOTRe (Marques d'approbation sur des travées du groupe Les Républicains.),...
M. Alain Marc. C'est vrai !
M. Jacques Mézard. ... de sinistre mémoire pour nous. Tel ne fut pas le cas avec les fusions de régions, imposées sans aucune consultation ni des conseils régionaux ni des conseils départementaux.
Mme Françoise Gatel. Absolument !
M. Jacques Mézard. Tel ne fut pas le cas avec les fusions d'intercommunalités, lorsque, sur la base d'un rapport d'un commissaire général à l'égalité des territoires, le gouvernement précédent décida qu'il fallait 1 000 intercommunalités, et pas plus, de 20 000 habitants au moins, en vertu d'une réflexion bureaucratique, tout simplement...
En ce qui concerne les communes, heureusement, nous avons échappé à la fusion autoritaire. Je pense que c'est une bonne chose, car la commune, quoique d'aucuns puissent en dire, est encore l'échelon de proximité auquel nos concitoyens sont attachés.
Néanmoins, nous avons toujours soutenu la possibilité de réaliser des fusions de communes. Dans nombre de cas, cela peut être un progrès, un moyen de mieux gérer et de résoudre certains problèmes. Ceux qui sont le mieux à même de le dire, ce sont les élus des conseils municipaux et les maires. Ce sont donc eux qu'il faut écouter.
En effet, on se rend compte encore davantage aujourd'hui, dans les moments un peu difficiles que nous vivons, que l'on a particulièrement besoin de l'échelon de proximité. Lorsque l'on est loin du terrain, monsieur le ministre, il peut arriver que l'on fasse beaucoup d'erreurs, même si, je l'ai bien compris, les choses vont beaucoup mieux depuis deux mois, plus précisément depuis le 16 octobre, en matière de cohésion des territoires... (Sourires.)
M. Sébastien Lecornu, ministre. Je fais ce que je peux !
M. Jacques Mézard. Nous y reviendrons à l'occasion d'autres débats, mais il n'y a jamais de mal à se faire plaisir !
M. Sébastien Lecornu, ministre. Je vous reconnais bien là, monsieur le ministre ! (Nouveaux sourires.)
M. Jacques Mézard. Ce qui est important, c'est que l'on simplifie au maximum les démarches pour permettre aux élus locaux, aux conseils municipaux qui le souhaitent de réaliser des fusions de communes. J'insiste bien sur la nécessité du volontariat : il n'y a rien de pire que les fusions imposées. Tout peut prêter à difficulté, à commencer par le nom des nouvelles communes. Aujourd'hui, on se rend compte sur le terrain que lorsque le nom de la commune nouvelle est mal choisi, cela engendre des difficultés au quotidien, en particulier concernant l'appréhension de la fusion par les citoyens.
Nous considérons que ce texte va dans le bon sens, parce qu'il ne crée pas de contraintes nouvelles. Il permet plutôt une simplification et je pense que son dispositif pourra être complété au cours de la navette.
Cela étant, il serait bon, monsieur le ministre, que l'on avance globalement une bonne fois sur la simplification et les moyens à mettre à disposition des conseils municipaux, plutôt que d'élaborer un nouveau texte tous les ans ou tous les deux ans, ce qui ne simplifie pas le travail des élus locaux.
J'ai déposé un amendement visant à faire davantage respecter le principe de la libre administration des communes. En effet, il n'est pas bon que le préfet passe outre lorsque des conseils municipaux ou la commission départementale de la coopération intercommunale, la CDCI, se sont exprimés. Je sais bien que l'administration, notamment la direction générale des collectivités locales, entend souvent imposer plutôt qu'écouter, mais ce n'est pas une bonne chose. Si le Sénat adopte cet amendement tendant à ce qu'il soit tenu compte du vote à la majorité simple de la CDCI dans certains cas de regroupement, ce sera un progrès.
Je terminerai en évoquant un cas concret, qui va se multiplier : celui de la fusion de deux communes de moins de 3 500 habitants issues de deux cantons différents. Dans cette hypothèse, il leur faut choisir leur canton de rattachement.
M. Jacques Mézard. En effet.
La circulaire du 16 mars 2018 ne permettra pas de régler les difficultés posées par la fusion de deux communes issues de deux cantons différents. Là encore, l'administration s'est distinguée, cette circulaire laissant au ministère la liberté de faire ce qu'il a envie de faire. Je vous la cite : « Ainsi, afin de ne pas remettre en cause le découpage cantonal effectué en 2014 mais seulement de procéder ponctuellement à des rectifications, le ministre de l'intérieur procèdera à l'examen au cas par cas de ces demandes en tenant compte des circonstances locales, et notamment – un terme que la commission des lois n'aime pas – de l'accord des communes et conseil départemental concernés. » Il sera donc procédé au cas par cas, mais la loi ne peut pas se contenter du cas par cas. Comme il semble s'agir d'un décret, je pense qu'on aurait pu le prendre depuis longtemps ! (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)