La participation massive des Birmans aux élections de novembre 2020 avait conduit à la victoire de la Ligue nationale pour la démocratie. Ce résultat aurait pu consolider la fenêtre progressiste ouverte en 2015 par quelques généraux réformateurs.
Hélas, en février dernier le coup d'État de l'armée birmane est venu plonger le pays dans un chaos que les auteurs de la proposition de résolution ont rappelé : répression, assassinat, détention ou déplacement guettent tous ceux qui contestent le nouveau régime.
La situation sécuritaire est en effet dramatique. À travers tout le pays, les forces armées birmanes répriment des manifestations pourtant pacifiques.
Alors que les généraux prétendaient seulement vouloir assurer le transfert du pouvoir, ils n'ont fait que déclencher un séisme politique et humanitaire largement condamné sur la scène internationale.
Au-delà des atteintes aux droits de l'homme qui nous émeuvent au premier rang, c'est aussi la situation économique qui nous inquiète. Cela a été souligné : l'économie est au point mort.
Les organisations non gouvernementales (ONG) et les agences de l'ONU font état de conséquences dramatiques.
Le programme des Nations unies pour le développement constate une aggravation de la pauvreté, et le programme alimentaire mondial alerte sur la hausse des foyers de malnutrition. Cette crise est un véritable retour en arrière pour les Birmans.
Malgré une situation compliquée; malgré les risques, malgré les moyens de la junte, force est de reconnaître le courage de la population, dont une grande partie a entendu l'appel à la désobéissance civile formulée par le Gouvernement d'unité nationale.
Entre la dictature et la révolution, le peuple birman a choisi. Il a choisi la liberté, et même les armes à travers la « force de défense populaire ».
Dans ces conditions, le soutien de la communauté internationale est indispensable pour appuyer cette quête de liberté. Le groupe du RDSE est donc naturellement favorable à toutes les initiatives dans ce sens.
Mais quelles sont les options ? Disons-le, elles ne sont pas nombreuses.
Il y a bien le régime de sanctions que la communauté internationale a mis en place depuis mars dernier. Mais nous savons combien les généraux ont imbriqué les intérêts militaires et les intérêts économiques du pays, notamment à travers les fameux conglomérats de l'armée et le Conseil administratif de l'État.
Monsieur le ministre, comment cibler les sanctions sans aggraver la situation humanitaire ? Comment également obtenir un soutien plus net des acteurs de la région ?
Je pense en particulier à l'Association des nations d'Asie du Sud-Est (Asean), dont certains des membres détournent les yeux tandis que d'autres normalisent leurs relations avec la junte.
Que penser également de la Chine et de la Russie, qui se sont abstenues lors du vote de la résolution de l'ONU du 18 juin dernier ? Sans avoir souhaité le coup d'État, ces deux puissances autoritaires et décomplexées sont fort logiquement mal à l'aise quand il s'agit d'appuyer le retour à la démocratie à l'extérieur, sans parler de leurs intérêts géostratégiques.
Cela dit, il ne faut pas baisser les bras, car les opposants birmans, comme ils l'ont maintes fois exprimé, attendent un soutien international, et notamment la reconnaissance du gouvernement d'unité nationale.
Monsieur le ministre, la proposition de résolution présentée devant le Sénat aujourd'hui nous invite à mettre en œuvre cette reconnaissance.
Fidèle à ses valeurs, la France, avec l'appui qu'elle doit rechercher de la part de ses partenaires européens, ne peut qu'apporter son soutien à une représentation qui émane des élections libres de 2020.
Mon groupe, je l'ai dit, est favorable à toute démarche qui aiderait le peuple birman à reprendre son destin en main, à travers un gouvernement civil qui, en outre, a donné des gages d'intégration de toutes les minorités ethniques du pays dans un cadre fédéral. Mes chers collègues, le RDSE votera donc la proposition de résolution.
Le coup d'État birman constitue une véritable infraction aux conventions internationales. Nous devons notre soutien au peuple birman qui fait preuve d'un grand courage et d'une détermination à retrouver le chemin de la démocratie.
J'ajouterai que l'issue de cette crise pourrait également démontrer la capacité de la communauté internationale à maintenir la stabilité dans la zone Asie-Pacifique, ce qui est une nécessité dans un monde déjà suffisamment fracturé.
Aujourd'hui, la pression internationale se porte sur l'Afghanistan, et à juste titre ; mais il convient aussi de ne pas oublier la Birmanie : les Birmans aussi sont dans la nuit. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe UC.)