Mme Véronique Guillotin. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Un laboratoire pharmaceutique américain et son partenaire allemand ont annoncé lundi de premiers résultats très encourageants concernant les tests de leur vaccin contre la covid-19. Cette nouvelle est incontestablement une lueur d’espoir dans le quotidien très assombri où sont plongés nos concitoyens depuis le début de l’année.
Néanmoins, il faut rester prudent et rappeler que ces résultats sont des résultats intermédiaires ; un long processus est encore nécessaire avant une possible mise sur le marché. Cette attente, monsieur le Premier ministre, doit être synonyme d’anticipation.
Le conseil scientifique a publié, le 9 juillet dernier, une note stratégique sur la vaccination contre la covid-19. C’est précisément sur cette stratégie que je souhaite vous interroger.
Outre les défis de l’achat et de la production, nous en aurons plusieurs autres à relever, en matière de stockage et de distribution des doses, de mobilisation des personnels chargés de les administrer, mais aussi de définition des publics cibles. Il est clair en effet que, malgré les injonctions de certains, toute la population ne pourra pas être vaccinée tout de suite.
J’en viens par là même à une autre problématique : toute la population ne voudra pas être vaccinée. Les résistances sont importantes et les théories complotistes vont déjà bon train. Sans pédagogie, sans transparence, sans confiance, aucun vaccin ne viendra à bout de ce virus.
J’aimerais donc savoir quelle est, à ce stade, la stratégie vaccinale du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Madame la sénatrice, les annonces faites par le laboratoire Pfizer et par son partenaire européen ont suscité – vous l’avez dit – une grande lueur d’espoir ; nous devons nous réjouir que des perspectives sur le front de la recherche s’offrent aujourd’hui à nous. Je tiens à le rappeler, dès le début de l’épidémie, le Président de la République, Emmanuel Macron, avait été l’un des moteurs, dans le cadre de l’Union européenne, pour qu’en termes de financement la recherche puisse aller le plus rapidement possible.
Pour autant, comme vous l’avez dit également, une grande prudence est de mise. Le laboratoire n’en est qu’à la phase 3 de l’évaluation et du test de ce vaccin. Un certain nombre de tests doivent encore être effectués dans les semaines et les mois à venir, notamment pour évaluer les effets secondaires éventuels du vaccin. Viendra ensuite le temps de la récolte des informations par les autorités sanitaires américaines puis européennes, avant une éventuelle mise sur le marché, la problématique devenant alors celle de la production du vaccin puis de sa distribution au sein de la population. Vous avez dû noter que l’Union européenne a d’ores et déjà précommandé 200 millions de doses de ce vaccin auprès du laboratoire Pfizer.
M. Roger Karoutchi. 300 millions, non ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Les questions que vous soulevez, madame la sénatrice, sont pertinentes.
D’une part – vous le savez probablement –, la Haute Autorité de santé a été saisie par le Gouvernement aux fins de formuler des recommandations quant à la stratégie que nous devrons adopter pour diffuser ce vaccin auprès de populations prioritaires parmi les Français.
D’autre part, comme vous l’avez très bien dit – souvenez-vous des débats que nous avions eus à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 autour de l’extension de l’obligation de couverture vaccinale des enfants –, la question de l’acceptation sociale des vaccins pour nos concitoyens est importante. Nous devrons, vous comme nous, faire montre de pédagogie envers eux.
Pour ce qui est des aspects plus concrets, techniques et opérationnels, sachez que, en matière de stockage et de distribution, le Gouvernement est d’ores et déjà pleinement mobilisé. Nous engageons par exemple la commande de seringues et d’aiguilles ainsi que de réfrigérateurs à moins 80 degrés, puisque, vous le savez, les conditions de conservation du vaccin l’exigent. Toutes ces questions sont très complexes et nécessitent de travailler en amont. C’est ce que fait le Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour la réplique.
Mme Véronique Guillotin. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de vos réponses. Je les entends et ne doute en aucun cas de votre sincérité. Mais on ne peut s’empêcher de penser aux pénuries de médicaments et de vaccins dont le rythme s’accélère maintenant depuis plusieurs années – ainsi des approvisionnements chaotiques du vaccin contre la grippe, alors même que l’enjeu était connu et la demande en forte augmentation.
Concernant la vaccination anti-covid-19, monsieur le secrétaire d’État, nous ne pouvons pas nous « louper », tant les conséquences sur la santé de nos concitoyens et sur l’économie de notre pays – vous l’avez dit – sont lourdes. Le défi est grand ; nous serons à vos côtés pour le relever. La situation est complexe, mais elle appelle un travail collectif que seule la concertation, dont le respect du Parlement fait partie, rendra possible. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Élisabeth Doineau et MM. Bernard Bonne et Alain Richard applaudissent également.)