Monsieur le ministre, la santé, ce ne sont pas que les hôpitaux et les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). C'est aussi tout un secteur médico-social qui intervient en amont et en aval des organes de santé plus traditionnels.
Ce sont des infirmières, des aides-soignantes, des aides à domicile ou encore des accompagnants éducatifs et sociaux qui s'estiment aujourd'hui déconsidérés car, si le Ségur de la santé a permis de nombreuses avancées, en consacrant notamment le principe du lieu de l'activité, il a aussi créé une profonde inégalité dans le monde de la santé et du social.
D'un côté, les personnels qui travaillent à l'hôpital ou dans les Ehpad ont droit à une prime. De l'autre, les soignants qui travaillent en maison d'accueil spécialisée ou en foyer d'accueil médicalisé et les aides à domicile n'ont droit à rien.
Chez moi, en Lozère, on en est arrivé à des situations ubuesques : ainsi, au sein d'une même association, certains salariés relevant du secteur sanitaire touchent la prime, tandis que ceux qui relèvent du médico-social ne la perçoivent pas : de quoi alimenter la colère de nombreux soignants !
S'agissant des aides à domicile, cette absence de reconnaissance est d'autant plus regrettable qu'un nombre considérable de nos aînés souhaitent être maintenus à domicile et que beaucoup ne peuvent pas assumer financièrement leur placement en maison de retraite. C'est d'autant plus insupportable qu'elles exercent souvent les mêmes missions que les personnels des Ehpad, mais avec moins de matériel spécialisé, et en consentant donc des efforts physiques plus importants.
Concernant les aides à domicile toujours, les organisations syndicales et les employeurs sont bien parvenus à un accord prévoyant une revalorisation de 15 % des salaires, mais la commission nationale d'agrément et les services de l'État bloquent la mesure, de peur que les départements ne puissent en assumer le financement.
La conseillère départementale de la Lozère que je suis comprend la position des départements, car ceux-ci font face à une hausse de leurs dépenses sociales et ne pourront pas supporter cette charge. C'est pourquoi il revient à l'État d'apporter une solution en la matière. En effet, le risque à terme est une fuite du personnel en raison de trop bas salaires et de la fermeture de certains établissements, qui jouent pourtant un rôle majeur et évitent bien des hospitalisations.
J'ai pris l'exemple des soignants et des aides à domicile, mais c'est bien tout un pan du secteur médico-social, lequel a pourtant géré cette crise, qui se sent aujourd'hui déconsidéré.
M. le président. Votre question !
Mme Guylène Pantel. Monsieur le ministre, dans le cadre de la nouvelle classification établie par le Ségur de la santé, vous avez créé deux catégories de soignants. Que comptez-vous faire pour mettre fin à cette inégalité et permettre à l'ensemble du monde soignant de bénéficier de la prime annoncée ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Guylène Pantel, merci pour votre question qui me donne l'occasion à nouveau de saluer l'action déterminante de tous les acteurs du soin, du care, du « bien prendre en charge » en direction de nos concitoyens les plus fragiles, parmi lesquels il faut évidemment mentionner les salariés qui interviennent à domicile dans le cadre d'activités médico-sociales, mais également les aides à domicile.
Je vais essayer d'être le plus factuel possible.
Il existe en réalité deux sous-questions dans votre question.
La première porte sur ceux que l'on appelle les oubliés du Ségur de la santé, c'est-à-dire tous les salariés du soin du secteur médico-social.
Vous savez que nous avons demandé à Michel Laforcade de réaliser une mission visant à définir des pistes en vue d'une revalorisation des salaires. L'engagement du Gouvernement en la matière est clair depuis le début :…
M. Jean-François Husson. Très clair ! (Sourires.)
M. Olivier Véran, ministre. … nous garantirons une hausse des revenus à toute cette catégorie de personnes qui, de façon un peu aberrante effectivement, comme vous l'avez dit, n'ont pas bénéficié des revalorisations décidées dans le cadre du Ségur de la santé, mais qui travaillent aujourd'hui aux côtés de soignants qui en ont, eux, profité. Ce n'est qu'une question de temps, et ce temps sera très court, madame la sénatrice, je peux vous l'assurer.
La seconde question a trait aux aides à domicile. Comme vous le savez, il s'est passé beaucoup de choses en ce qui les concerne.
D'abord, et à la demande des élus de tous bords, l'État et les départements se sont entendus pour leur attribuer une prime Covid si bien que, en pratique, ce sont plus de 1 000 euros qui ont été versés aux aides à domicile dans plus de cent départements. J'en ai vu beaucoup durant la crise et pendant le premier confinement : croyez-moi, pour ce qui les concerne, cette prime n'est pas du tout usurpée.
Ensuite, nous avons engagé un travail sur la revalorisation du point d'indice : les négociations sont rouvertes pour intégrer dans la future grille indiciaire de la branche de l'aide à domicile, en plus des efforts consentis par les départements, les 200 millions d'euros débloqués de façon pérenne par l'État pour alimenter la branche autonomie.
Notre engagement de revaloriser les salaires de 200 millions d'euros est absolument inédit. Cet effort est justifié, et je n'ai aucun doute, compte tenu de toute l'attention que portent l'ensemble des élus aux aides à domicile, que nous parviendrons à un consensus et à un accord le plus rapide possible. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)