Avec plus de 6 000 amendements déposés au palais Bourbon et près de 3 000 au Palais du Luxembourg en première lecture, et plus de 1 000 en nouvelle lecture, ce projet de loi de finances a de nouveau battu des records dont, en réalité, nous nous passerions bien. En effet, la quantité n'est pas ici forcément synonyme de qualité et clarté, les délais d'examen, fixés par la Constitution, restant incompressibles.
Malgré les circonstances exceptionnelles, il faut saluer le Gouvernement qui, dans la dernière loi de finances rectificative, s'est limité à opérer des ajustements strictement budgétaires.
Cependant, il reste un effet collatéral déjà observé ces trois dernières années : les articles non rattachés sont devenus une sorte de « troisième partie » du budget, avec plusieurs dizaines d'articles supplémentaires – et non des moindres, parfois ! – et des mesures comme la prorogation en 2021 du fonds de solidarité pour les petites entreprises et des prêts garantis par l'État (PGE) ou la refonte des missions de la direction générale des douanes.
Comme cela était prévisible, la mission « Plan de relance » a suscité un long débat. Après la promulgation de la loi de finances, il sera impératif de veiller strictement à la bonne exécution de ces crédits supplémentaires. Les Français ne croient plus à l'argent magique, nous non plus. Néanmoins, il faudra rapidement analyser comment sera géré ce surcroît colossal de dette.
Le contexte inédit et l'adoption par le Sénat de budgets essentiels comme ceux de la justice ou de l'intérieur n'auront pas suffi pour parvenir à un accord en commission mixte paritaire. Je regrette moi aussi ce nouvel échec, qui entraîne une plus faible survie de nos amendements au cours de la navette parlementaire. Il est vrai que, comme chaque année, il y avait peu de doute...
Les députés ont finalement supprimé la contribution exceptionnelle introduite par le Sénat sur les contrats d'assurance. Nous espérons a minima que le Gouvernement a obtenu des garanties suffisantes de la part des assureurs, qui jouent un rôle essentiel dans la crise que nous traversons. À eux aussi de faire preuve de responsabilité !
La plupart des nouvelles dispositions introduites par le Sénat ont été supprimées. Parmi les dispositions néanmoins retenues, je relève le crédit d'impôt pour les agriculteurs engagés dans la sortie du glyphosate et le maintien du volet national d'Écophyto, défendu par Henri Cabanel. Je salue également le maintien des dispositions relatives au renforcement de l'utilisation d'énergies renouvelables dans les transports, proposées par Nathalie Delattre.
Je souhaite néanmoins exprimer une inquiétude de plus en plus forte en ce qui concerne les finances locales. Le rapport publié hier par la Cour des comptes a confirmé ce que l'on pouvait entendre depuis plusieurs mois : la crise entraîne une fragilisation financière de certaines collectivités, compensée seulement en partie par le plan de soutien de l'État. Je pense en particulier aux départements et à l'investissement public local, alors que le renouvellement des élus constitue une période charnière.
En conclusion, je m'interroge sur le devenir de cette loi de finances, après quatre révisions de la loi de finances initiale pour 2020. Rendez-vous dans un an pour analyser l'exécution du budget pour 2021, en espérant que nous parviendrons collectivement à maîtriser la situation sanitaire et ses conséquences sociales et économiques, avec une stratégie vaccinale – nous en débattrons demain – qui devrait susciter des espoirs plutôt que des doutes.
Mon groupe demeure par principe attaché à la poursuite de la discussion parlementaire. C'est pourquoi, comme vous le savez, si nous comprenons la philosophie qui sous-tend la motion tendant à opposer la question préalable, nous nous opposerons par principe à son adoption. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)