M. Jean-Claude Requier. Monsieur le Premier ministre, lors de la réunion du mercredi 17 mars du comité de liaison parlementaire pour la gestion de la crise sanitaire, qui a rassemblé sous votre présidence plusieurs de vos ministres, le président du Sénat et les présidents des groupes de la Haute Assemblée, je vous ai demandé, au nom du RDSE, de retarder le début du couvre-feu de dix-huit heures à vingt heures, en raison de l'allongement de la durée du jour et de l'arrivée de l'heure d'été.
Vous m'avez répondu que l'heure d'été posait problème et vous avez annoncé le lendemain le décalage du couvre-feu de dix-huit heures à dix-neuf heures, faisant ainsi gagner une heure de jour, de lumière et de liberté à nos concitoyens. Je voudrais vous en remercier.
M. Emmanuel Capus. Très bien !
M. Jean-Claude Requier. Pour les seize départements les plus touchés par la pandémie, vous avez ensuite annoncé une troisième variante de confinement, une troisième voie, à savoir un confinement « moins confiné », toujours vigilant dans l'espace privé, mais plus large dans l'espace public, permettant aux habitants de se déplacer davantage que lors des précédents confinements.
Toutefois, c'était sans compter samedi sur la fameuse attestation dérogatoire de deux pages, avec quinze motifs de déplacements retenus et trois limites fixées à 1 kilomètre, à 10 kilomètres et à 30 kilomètres...
Cette attestation a aussitôt été qualifiée de « chef-d'œuvre bureaucratique ». (Marques d'approbation sur de nombreuses travées.) Vous l'avez supprimée le dimanche, puis ressortie en version simplifiée.
Cette complexité et ces excès de normes contribuent à aggraver la morosité, la lassitude et la fatigue de nos concitoyens, mis à rude épreuve depuis un an.
Monsieur le Premier ministre, en cas d'aggravation de la pandémie, quelles mesures envisagez-vous de prendre dans les seize départements de la zone rouge et dans ceux de la zone verte ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le sénateur Requier, je vous remercie, tout d'abord, d'avoir rappelé le processus de concertation que j'organise de manière régulière avec les présidents des différents groupes du Sénat, comme du reste de l'Assemblée nationale, avant toute prise de décision.
Je vous remercie également d'avoir observé que, contrairement à ce que je peux entendre ici ou là, ces concertations sont des exercices extrêmement utiles et que je tiens le plus grand compte des observations formulées lors de ces réunions.
M. Rachid Temal. Cela ne s'est pas vu !
M. Jean Castex, Premier ministre. Vous venez, en particulier, de faire référence à l'heure du couvre-feu. Les arguments que vous avez invoqués, notamment le passage à l'heure d'été, étaient parfaitement pertinents.
En réponse à votre question, monsieur le sénateur, le Gouvernement va continuer dans cette stratégie, qui est d'abord territorialisée. J'y insiste, car il s'agit également d'une demande régulièrement exprimée par le Sénat. Je dois dire ici que nous maintiendrons cette stratégie autant que cela sera possible.
Il n'a échappé à personne, sur aucune travée de cette assemblée, que nous sommes face à une troisième vague particulièrement virulente. (Manifestations de surprise feinte sur les travées des groupes SER et Les Républicains.)
Je sais que vous aimez toutes et tous observer ce qui se passe dans les pays étrangers, en Allemagne, en Italie, etc. Aussi, posons les choses telles qu'elles sont : nous sommes confrontés à une troisième vague extrêmement importante, qui nous conduit à prendre des mesures territorialisées et de freinage les plus adaptées possible.
Toutefois, nous pourrions effectivement, monsieur le sénateur, être conduits à les durcir, en fonction de l'évolution de la pandémie, car nous avons le devoir de nous adapter, comme nous l'avons toujours fait !
Nous tenons également compte de ce que nous avons appris l'année dernière et lors des mesures de freinage antérieures.
M. Bruno Retailleau. Bravo ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean Castex, Premier ministre. Effectivement, les retours d'expérience montrent que les lieux de contamination clos sont beaucoup plus dangereux que l'espace extérieur.
M. Bernard Jomier. Ah bon ? (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. Jean Castex, Premier ministre. Par conséquent, nous avons intégré cette considération dans les mesures prises, ce qui ne signifie pas, je le dis de façon très solennelle devant le Sénat, qu'à l'extérieur on puisse faire n'importe quoi ! (Marques d'ironie sur les travées des groupes SER et Les Républicains.)
C'est pourquoi nous avons clairement défini dans l'attestation ce qu'il est possible de faire et ce qu'il n'est pas possible de faire ! (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour la réplique.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le Premier ministre, dans la gestion de cette crise, continuez à associer les élus locaux à votre réflexion et à leur faire confiance.
Par ailleurs, pour rédiger une attestation simple, fonctionnelle et applicable, vous pourriez peut-être demander un avis à un maire expérimenté, à un conseiller départemental chevronné ou peut-être même à un sénateur ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées des groupes SER, INDEP, UC et Les Républicains.)