Débat sur le thème : « Quel bilan de l'action du Gouvernement en matière de justice et de sécurité ? »
Pêle-mêle, je citerai la loi Asile et immigration, la loi Sécurité globale ou encore les lois sur les violences sexuelles et sexistes et sur les violences sexuelles sur mineurs, toutes accueillies plus ou moins chaleureusement, mais qui prouvent une volonté de réforme, appuyée par une hausse des crédits, qu'il convient de saluer.
La protection judiciaire de la jeunesse, que je connais bien, fait face à plusieurs défis. Je pense tout d'abord au code de la justice pénale des mineurs, dont le Sénat avait proposé de reporter l'entrée en vigueur au 30 septembre 2021 afin de permettre aux juridictions de préparer, dans le calme, la transition vers les nouvelles procédures.
Au 31 décembre prochain, seuls 30 % des personnels auront été formés aux nouvelles procédures. Le manque de formation a des effets concrets, notamment sur l'application de certaines mesures par les agents. Je pense, par exemple, aux mesures judiciaires d'investigation éducative, qui devraient, en 2023, être réalisées en moins de neuf jours pour permettre de tenir les délais fixés par le code de la justice pénale des mineurs. Ces mesures, qui permettent notamment une évaluation de la personnalité d'un mineur en difficulté, de sa situation familiale et sociale, de ses conditions de vie et celles de ses parents, sont actuellement réalisées en seize jours en moyenne. Il faudra donc gagner presque une semaine, ce qui représente à la fois un défi pour les services et un défi institutionnel.
L'audience unique constitue aussi l'un des enjeux liés à la réforme de la justice pénale des mineurs. Mise en place immédiatement à Paris et Marseille, elle permet le jugement rapide des mineurs ayant des antécédents judiciaires. Cette mesure entraîne une augmentation du nombre de condamnations à des peines d'incarcération, ce qui vient conforter le taux particulièrement élevé d'incarcération des mineurs dans notre pays.
Certes, l'incarcération peut parfois se révéler nécessaire, mais je ne vois pas cette augmentation comme un bon signe pour notre société. Le développement des peines alternatives à l'incarcération des mineurs, comme à celle des majeurs, est une nécessité.
À cet égard, je regrette qu'une large part des hausses de crédits soit dédiée à la privation de liberté : il faut dépenser plus, mais il faut aussi dépenser mieux pour « désasphyxier » les tribunaux et enrayer la « désespérance collective des magistrats » – pour reprendre les termes de la présidente de la formation plénière du Conseil supérieur de la magistrature, Chantal Arens – en recrutant des magistrats et des greffiers, si possible titulaires.
Dépenser mieux enfin pour rendre notre justice plus rapide et plus efficace, pour rétablir la confiance de nos concitoyens et alléger le travail des services de police et de gendarmerie, car l'une ne va pas sans l'autre.
Il nous faudrait d'ailleurs réfléchir à la réponse pénale que nous souhaitons apporter, car policiers et gendarmes sont souvent désemparés face à des individus qu'ils retrouvent dans la rue le lendemain de leur interpellation.
En ce qui concerne la police, ma réflexion est peu ou prou la même : les moyens sont certes en hausse, mais nous constatons des manques d'effectifs et de matériels sur l'ensemble de nos territoires, notamment ruraux. Ces manques se traduisent par une présence policière diminuée, ce qui augmente le sentiment d'insécurité et affaiblit, in fine, les finances locales.
En effet, nombre d'entre nous ont été confrontés à des maires qui, faute d'effectifs de police nationale suffisants, ont créé ou renforcé les effectifs de police municipale, quand bien même cette dernière ne répond pas aux mêmes besoins, ne remplit pas les mêmes missions et ne dispense pas la même formation.
Malgré des améliorations, des chantiers demeurent en matière de justice et de sécurité. J'espère que les réponses ne seront pas apportées seulement dans les programmes électoraux des futurs candidats à la présidence de la République, mais surtout dans les moyens alloués dans les années à venir.
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