Projet de loi de finances pour 2020 : mission "relations avec les collectivités territoriales"
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Éric Gold. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Éric Gold. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, avant d'aborder les crédits de cette mission, je formulerai deux remarques liminaires.
En premier lieu, la suppression de la taxe d'habitation et la réforme de la fiscalité locale qu'elle entraîne ne peuvent être menées sans que l'on se penche, plus globalement, sur les dotations et les fonds de péréquation, qui souffrent d'indicateurs souvent obsolètes. À nos yeux, il est donc indispensable de prévoir en parallèle une remise à plat des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales.
M. Philippe Dallier. Chiche !
M. Éric Gold. C'est la raison pour laquelle nous estimons qu'un projet de loi de finances spécifique aux collectivités locales devrait être examiné par le Parlement chaque année.
En second lieu, la préconisation du Sénat – reporter d'un an l'entrée en vigueur de la réforme – permettrait de solidifier le dispositif et d'éclaircir les zones d'ombre. Il faut bien le reconnaître : les élus ne sont pas rassurés, qu'il s'agisse du calcul du potentiel financier et fiscal ou de la compensation à l'euro près de la suppression de la taxe d'habitation. Gardons en tête les atermoiements qui ont suivi certaines réformes mal préparées et leurs conséquences sur les collectivités. Nous ne voulons pas voir l'histoire se répéter !
Mais revenons-en à cette mission et aux articles qui y sont rattachés, lesquels réservent quelques bonnes surprises.
Nous saluons la stabilité dont bénéficient les dotations depuis l'an dernier, même si nous craignons qu'elles ne finissent par s'éroder, faute d'être indexées sur l'inflation.
Au titre de la péréquation verticale, les augmentations de DSU (dotation de solidarité urbaine) et de DSR (dotation de solidarité rurale), à hauteur de 90 millions d'euros chacune, restent malgré tout plus faibles que celles qui ont été observées l'année dernière. MM. les rapporteurs le soulignent avec raison : la réforme de la fiscalité locale doit nous permettre de repenser les indicateurs de ces dotations en retravaillant leurs règles d'attribution. Par ailleurs, la DSIL, pérennisée en 2018, est maintenue à son niveau des trois dernières années.
Au titre de la péréquation horizontale, la montée en puissance du FPIC ne permet pas réellement d'aplanir les écarts de richesse entre collectivités. Or les défauts de cet instrument sont de plus en plus manifestes. À cet égard, nous proposons plusieurs amendements : dans l'attente d'une réforme plus structurelle de révision des critères du FPIC, ces dispositions permettront pour le moins de ne pas trop pénaliser certains territoires qui bénéficient de la compensation de la taxe professionnelle.
Le projet de loi de finances pour 2020 engage un alignement bienvenu des montants de péréquation alloués aux communes des départements d'outre-mer par rapport à la métropole. En outre, il amorce une réforme des modalités de répartition de cette enveloppe : nous l'approuvons, car elle renforce la solidarité nationale envers les communes d'outre-mer les plus pauvres et assumant le plus de charges.
De surcroît, nous prenons acte de la traduction anticipée dans ce texte des mesures votées dans le cadre du projet de loi Engagement et proximité, conduisant à une majoration de la dotation particulière « élu local ».
Pour ce qui concerne le programme 122, les crédits dédiés aux aides exceptionnelles sont en diminution : la cohérence de ce choix nous interpelle, au vu de la fréquence des catastrophes naturelles auxquelles nos concitoyens et les collectivités doivent faire face.
Venons-en aux articles rattachés, qui sont, comme souvent, nombreux.
L'automatisation du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) est évidemment attendue : elle permettra de réduire les délais de versement et de fiabiliser les montants prévisionnels donnés aux collectivités. Mais encore faut-il que son coût reste nul ! En conséquence, le report d'un an est logique : il permettra de poursuivre les travaux d'évaluation et, ce faisant, de rendre la réforme acceptable pour les collectivités.
La DETR est gelée à 1 milliard d'euros en autorisations d'engagement et à 800 millions d'euros en crédits de paiement, pour la bonne cause : mieux concentrer la répartition des crédits sur les territoires ruraux. Plusieurs amendements, dont certains déposés au nom du RDSE, visent justement à en modifier les modalités d'attribution afin de les rendre plus transparentes : je pense notamment à la commission DETR.
Il faut saluer l'initiative du Gouvernement de pérenniser le soutien aux communes nouvelles dans un cadre clarifié pour les fusions qui suivront les élections municipales. De même, nous sommes favorables à la pérennisation du mécanisme de réalimentation des EPCI ayant une faible dotation.
Toutefois, avant de conclure, j'évoquerai un désaccord de fond persistant depuis l'examen du projet de loi pour une école de la confiance. L'abaissement à 3 ans de l'instruction obligatoire alourdit les charges communales ; or les dotations des communes les plus pauvres n'ont pas augmenté ; une compensation financière au profit de toutes les communes a également été écartée.
A minima, il faudrait exclure le surcroît de dépenses obligatoires induit par l'abaissement à 3 ans de l'âge de l'instruction obligatoire du calcul de l'objectif national d'évolution des dépenses réelles de fonctionnement des collectivités territoriales. Nous avons proposé d'inscrire cette mesure dans la loi, sans succès ; mais nous espérons que le ministre de l'éducation nationale tiendra sa promesse sur ce sujet.
Mes chers collègues, nous accueillerons a priori favorablement cette mission et les articles qui y sont rattachés. Toutefois, nous serons particulièrement attentifs au sort qui sera réservé aux amendements déposés au nom de notre groupe. Plus globalement, même si nous approuvons les crédits de cette mission, notre vote ne fera pas oublier cette question épineuse : l'autonomie fiscale et financière des collectivités, à laquelle nous sommes fondamentalement attachés et qui – nous le savons – risque fort d'être remise en cause dans les années à venir. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Agnès Canayer applaudit également.)
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