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Proposition de loi visant à créer un droit à l'erreur des collectivités locales dans leurs relations avec les administrations et les organismes de sécurité sociale

M. le président. La parole est à Mme Josiane Costes.

 

Mme Josiane Costes. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis 1982, les actes de la décentralisation se succèdent, tous accompagnés de discours bienveillants sur les vertus de l’action locale et des élus. L’acte I a vu la suppression de la tutelle administrative, le transfert du pouvoir exécutif du préfet au président du conseil général et l’instauration du transfert de ressources. L’acte II visait l’autonomie financière des collectivités territoriales, le transfert de nouvelles compétences et la constitutionnalisation de la région. L’acte III, quant à lui, a consacré l’avènement d’une forme de contractualisation entre l’État et les territoires.

Il semble ainsi que les gouvernements successifs s’entendent pour présenter ces réformes comme procédant d’une confiance pérenne en l’action territoriale. Notre assemblée ne pourrait que s’en réjouir si les actes suivaient toujours réellement ces discours.

Oui, notre assemblée possède par essence une idée claire des réalités locales et a le privilège de porter ici, en connaissance de cause, la voix des territoires ! Or il est aujourd’hui malheureusement banal de rappeler que les collectivités territoriales peinent à exercer sereinement les compétences qui leur ont été transférées. D’une part, ces transferts ont été nombreux, et ils n’ont pas été accompagnés des moyens nécessaires à leur bon exercice. D’autre part, et c’est l’objet de mon intervention, leur situation est aggravée par la complexification croissante du droit. C’est là encore, hélas, un lieu commun.

Ainsi, les textes de simplification du droit pullulent. La récente création d’un droit à l’erreur au profit des usagers de l’administration procède de la même prise de conscience. C’est pourquoi nous avions quasi unanimement défendu au Sénat, pendant la discussion de la loi Essoc, un amendement qui visait à étendre le champ d’application de ce droit à l’erreur aux collectivités territoriales et à leurs groupements. Rejeté à l’Assemblée nationale par la majorité, nous l’avons porté de nouveau lors de l’examen de la loi Engagement et proximité. Cette demande transcende les clivages partisans, parce qu’elle touche à l’exercice même des compétences de l’élu local, et particulièrement des maires des petites communes, auxquels tant de Français sont attachés.

Face à la complexification de notre droit, à la multiplication des procédures, il devient difficile pour les collectivités d’agir sans commettre d’erreurs. Cela est particulièrement vrai pour les plus petites d’entre elles et les EPCI qui ne comptent pas de grande commune en leur sein. Ce manque de moyens les prive de service juridique, d’une expertise approfondie, comme du recours ponctuel à des cabinets spécialisés.

Dans un département comme le mien, le Cantal, de nombreuses petites communes sont incapables de faire face à ces évolutions. Comment voulez-vous qu’un secrétaire de mairie, présent une fois par semaine et le plus souvent dépourvu d’une formation juridique appropriée, ne commette jamais la plus petite des erreurs ? Or celle-ci peut être lourde de conséquences, d’autant que le contrôle de légalité des préfectures pâtit, lui aussi, d’un manque de moyens.

Il arrive dès lors souvent que des collectivités perdent le bénéfice de subventions dont elles ont besoin en raison d’omissions minimes et involontaires, et il en va ainsi de nombreux actes juridiques. Ces conséquences disproportionnées pénalisent nos collectivités et, partant, nos concitoyens. L’objet de cette proposition de loi est d’y remédier. Le groupe du RDSE la soutiendra, comme les précédents amendements qui allaient en ce sens. Nous ne demandons pas de nouveaux moyens, mais simplement que l’État prenne en compte, avec bienveillance, les difficultés que rencontrent les collectivités territoriales. Reconnaître ce droit à l’erreur serait un symbole rassurant et bienvenu de cette considération.

Comme je l’ai dit, ce sont surtout les petites communes qui gagneraient à ce que cette proposition de loi soit adoptée. À l’avenir, pourquoi ne pas imaginer, le jour où le droit à la différenciation aura une portée normative effective, de limiter le champ d’application de ce droit à l’erreur aux plus petites collectivités ?

Monsieur le secrétaire d’État, le Sénat soutient quasi unanimement cette mesure. Nous insistons, parce que nous la croyons bonne. C’est pourquoi nous vous demandons, cette fois, de nous entendre. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Guillaume Arnell applaudit également.)

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