Proposition de loi visant à faciliter la mise en oeuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » au coeur des territoires
M. Éric Gold. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission spéciale, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, moins de deux ans après la promulgation de la loi Climat et résilience, qui a créé les objectifs du zéro artificialisation nette des sols, nous voici déjà quasi contraints d'en modifier les paramètres. La complexité et l'opacité du dispositif ont entraîné tant d'incompréhension et de frustration qu'il était indispensable d'opérer certains ajustements, sous peine de voir ces mesures essentielles rater leur cible.
En réalité, la frustration est bien plus ancienne : depuis la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), certains EPCI ont atteint une taille si grande que certains maires de communes rurales se sentent exclus de la politique d'aménagement du territoire. Aussi, c'est de simplicité et de souplesse dont nous avons besoin, pour que chaque élu local soit en mesure de s'approprier ces outils, qui permettront de développer chaque territoire dans le respect des objectifs de transition écologique que le pays s'est fixés.
L'artificialisation est aujourd'hui la première cause de l'érosion de la biodiversité en France. En quarante ans, elle a progressé de 70 %, quand la population n'a augmenté que de 19 %. Ainsi, 30 000 hectares d'espaces naturels sont consommés chaque année, majoritairement au profit du logement.
Les conséquences néfastes de cette artificialisation sont bien connues : altération durable des fonctions écologiques du sol, augmentation des risques naturels par le ruissellement, atteinte au potentiel de production agricole et de stockage de carbone et, dans le cas de l'étalement urbain, augmentation des émissions de gaz à effet de serre dues à la dépendance à la voiture individuelle.
L'alerte rouge climatique a été lancée, et la France y a répondu en se fixant des objectifs ambitieux. Mais que faire des objectifs s'ils ne s'accompagnent pas de mesures applicables ?
L'ambition est de réduire par deux d'ici à 2031 le rythme de consommation d'espaces naturels, et d'atteindre, d'ici à 2050, le « zéro artificialisation nette » des sols, c'est-à-dire que, pour chaque parcelle urbanisée, nous devrons rendre une parcelle équivalente à la nature.
Les sénateurs ont souscrit à ces objectifs en 2021, tout en posant deux principes fondamentaux : un lien souple entre documents d'urbanisme régionaux et locaux ; une différenciation locale plutôt qu'une application uniforme et purement mathématique.
Force est de constater que les décrets d'application ne répondent pas à ces exigences et que persiste un manque de visibilité et d'accompagnement, alors même que les documents de planification régionaux doivent être modifiés d'ici à 2024.
Représentants des élus locaux, nous ne pouvions pas rester inactifs devant les difficultés et les inquiétudes soulevées.
Cette proposition de loi tente d'y répondre.
Nous approuvons le report d'un an pour la déclinaison des objectifs au sein des documents de planification et d'urbanisme. Le calendrier n'était pas tenable en l'état, notamment parce qu'il manque encore de nombreux outils d'information à la main des collectivités, à commencer par l'essentiel : l'accès aux données relatives à la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers.
Nous partageons la volonté des auteurs de la proposition de loi d'assouplir la hiérarchie des normes entre les documents d'urbanisme et de planification. Dans le cadre des Scot, des plans locaux d'urbanisme intercommunaux (PLUi) et des cartes communales, les élus locaux devront s'efforcer de prendre en compte les objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols fixés par les documents régionaux. Il ne s'agit plus d'exiger une compatibilité.
Nous soutenons le principe d'une surface minimale d'un hectare urbanisable par commune jusqu'à 2031. Il garantit aux communes rurales la capacité de se développer et de répondre à leurs besoins locaux, notamment en services publics.
L'article 4 porte sur la comptabilisation des grands projets de construction au sein d'une enveloppe nationale. Il était urgent de répondre à cette problématique, faute de quoi nous risquions de priver de droits à construire des régions accueillant un projet d'envergure nationale ou européenne. Cependant, nous maintenons notre proposition d'intégrer tous les bâtiments et services publics à cette enveloppe nationale pour favoriser la solidarité entre les territoires. En effet, la définition des projets devant se situer sur l'enveloppe nationale, régionale ou supra-communale pourrait virer au casse-tête.
Enfin, si nous comprenons l'intérêt d'améliorer le dialogue territorial, il est illusoire de croire que les nouvelles conférences régionales, composées de cinquante-six membres, et qui n'ont qu'un droit de proposition des projets, régleront le problème de la prise en compte des besoins des territoires ruraux. Aussi, l'article 3 ne nous paraît pas nécessaire.
Le groupe RDSE votera ce texte, mais souhaite avant tout faire passer un message de lisibilité et de simplification pour les élus locaux. Il n'est pas normal que, même pour nous, qui sommes habitués à voter des lois parfois ardues, le sujet des ZAN demeure aussi complexe.
Comme souvent, nous appelons de surcroît à trouver des sources de financement plus dynamiques pour les communes, sans quoi leur développement continuera à se jouer sur l'arrivée de nouveaux habitants, ce qui implique la construction de nouveaux logements. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
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