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Proposition de loi visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne

M. Bernard Fialaire. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, si la Petite Poucette de Michel Serres a la chance d'avoir au bout de ses doigts l'accès gratuit à l'ensemble des données universelles répertoriées dans les encyclopédies, nous savons que les enfants ont aussi entre les mains un risque élevé d'addiction aux réseaux sociaux qui leur colle aux doigts.

Le caractère addictif de ces réseaux, accentué par une course effrénée à l'engagement, est un danger pour la santé et pour la société. Sans régulation, les algorithmes augmentent leur emprise sur le cerveau des enfants contre laquelle les parents ne peuvent pas toujours lutter.

Les chiffres sont là : selon la Cnil, 82 % des 10-14 ans consultent internet sans leurs parents ; quelque 46 % des 6-10 ans disposent de leur propre smartphone, selon e-Enfance.

La consultation de contenus inappropriés par les enfants et par les jeunes adolescents a de lourdes conséquences psychologiques et sociales, allant – cela a été rappelé – de l'addiction au suicide, en passant par une baisse de l'estime de soi liée à des comparaisons avec des influenceurs, aux mauvaises rencontres ou au cyberharcèlement.

Pour toutes ces raisons, la régulation des réseaux sociaux est nécessaire et urgente. À ce titre, j'ai déposé un amendement tendant à ce que ces réseaux affichent un message d'avertissement concernant les conséquences néfastes que peut entraîner leur utilisation sur la santé physique et mentale.

Cette proposition de loi ne vise ni à punir les plus jeunes ni à provoquer des conflits relationnels avec les parents. Au contraire, ses auteurs aspirent à remettre le parent au cœur de la relation entre le mineur et l'outil numérique.

Ce texte constitue une avancée en matière de protection numérique. Il s'inscrit dans la lignée de l'article 8 du règlement général sur la protection des données (RGPD), un texte de l'Union européenne qui fixe déjà à 15 ans l'âge pour consentir au traitement de ses données personnelles.

Ainsi, en prévoyant une autorisation parentale pour l'inscription d'un mineur de 15 ans sur un réseau social, les auteurs de la présente proposition prolongent et améliorent le RGPD.

Toutefois, le numérique est une technologie connaissant une telle évolution qu'un contrôle à 100 % n'existe pas. Quand on est caché derrière son écran, la tentation de jouer avec les règles est grande.

En ce sens, il faut, sur la base d'un référentiel élaboré par l'Arcom et par la Cnil, mettre en place un outil technique permettant de contrôler l'âge des inscrits et des futurs inscrits. Aucune solution technique ne répond à ce jour à ce défi à l'échelle de la population. Toutefois, nous pouvons beaucoup espérer d'initiatives telles qu'EuConsent, soutenue par la Commission européenne.

Les réseaux sociaux doivent aussi prendre leur part dans la lutte contre la haine et les dérives en ligne. Ils doivent empêcher la consultation de contenus inappropriés au moyen de leurs algorithmes, sachant déjà très bien orienter leurs contenus vers des publics ciblés.

Si ces réseaux ne jouent pas le jeu de la collaboration et de la prévention, les pouvoirs publics seront en mesure de prononcer des sanctions dissuasives sur leur chiffre d'affaires mondial.

Cette proposition vise à lutter contre toutes les formes de haine en ligne. En ce sens, ses auteurs n'ignorent pas le cyberharcèlement, un fléau qui touche plus d'un million d'élèves chaque année. Aussi, si la mise en place des numéros 3820 et 3818 va dans le bon sens, il serait à mon avis plus simple et plus efficace de n'en proposer qu'un seul, bien repérable, ce qui n'est pour l'instant pas le cas ; par ce standard unique, le jeune serait orienté vers l'entité compétente.

Parce que l'État ne doit laisser aucun enfant seul, en détresse et apeuré derrière son écran, nous voterons cette proposition de loi. (M. Jean-Claude Requier applaudit.)

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