Questio orale sur la pérennité du service des urgences de l'hôpital de Manosque
M. Jean-Yves Roux. Madame la ministre, il y a maintenant un an, sur ces mêmes travées, je vous alertais des très grandes difficultés rencontrées par les urgences de l'hôpital de Manosque.
En 2022, nous déplorions vingt-huit jours de fermeture de nuit durant l'été.
L'année 2023 n'est pas terminée, mais nous disposons de chiffres alarmants : depuis début le début de l'année 2023, les urgences de Manosque sont fermées cent quatre-vingts nuits et dix-huit journées, et seuls 39 % sont des jours régulés.
Pour le mois de novembre, il n'y aura aucunes urgences de nuit jusqu'au 15 novembre quand des ouvertures de jour sont planifiées, sauf les 4, 5, 8 et 13 novembre, en espérant que les usagers retiendront l'information… et si possible leurs pathologies !
Au total, les urgences de Manosque connaissent une très forte dégradation de leurs services et ont peu de perspectives de rétablissement. Quant au centre La Vista, qui vient d'ouvrir à proximité, il annonce déjà « ne pas avoir vocation à les remplacer ».
Madame la ministre, nous avons bien compris que la réponse que vous allez faire à nos concitoyens est d'appeler le 15. Je vous rassure tout de suite, c'est bien évidemment ce que tous les élus conseillent à leurs administrés depuis quelques années !
Est-ce suffisant, puisque la situation se dégrade encore ? J'ai bien peur que non. C'est toute la chaîne des premiers secours et recours qui souffre désormais durablement de cette dégradation.
Le précédent ministre de la santé, M. Braun, nous annonçait le 1er septembre 2022 une série de mesures qui devaient, selon lui, produire des effets : la loi portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, dite loi Rist, la prime de solidarité territoriale adaptée, le soutien de dispositifs innovants d'aides médicales d'urgence et des appels à candidatures.
Ces mesures, madame la ministre, n'ont pas permis d'améliorer la situation d'un service public hospitalier qui s'enfonce dans la crise.
Mes chers collègues, le « provisoire-qui-change-tout-le-temps » doit-il devenir une norme en matière de santé publique, notamment dans nos territoires ruraux ? Ce provisoire use les personnels de l'hôpital, il use les premiers secours et les pompiers, il fragilise des patients qui trouvent porte close et n'ont pas de rendez-vous en médecine de ville.
En tant que sénateur, je défends l'équilibre territorial du département, y compris en termes de santé, et je constate qu'il est très fragilisé. En tant que sénateur, je mesure aussi que cette situation met à mal les autres activités de l'hôpital.
Aussi, madame la ministre, comment comptez-vous conforter rapidement les urgences de Manosque, l'ensemble du site et des activités de l'hôpital, redonnant ainsi confiance aux acteurs de la santé des Alpes-de-Haute-Provence ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le sénateur Jean-Yves Roux, sans nier les difficultés réelles que nous avons déjà évoquées il y a quelque temps et que vous énoncez une fois de plus, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour renforcer le recrutement et l'attractivité du centre hospitalier de Manosque.
Cela passe d'abord par la mise en place d'une organisation permettant de maintenir une prise en charge des patients malgré les tensions qui sont réelles sur les ressources humaines.
Cette organisation repose sur plusieurs leviers.
Tout d'abord, des médecins correspondants du service d'aide médicale urgente (Samu) sont installés à proximité de la ville de Manosque, afin de permettre à la population de bénéficier des premiers soins urgents dans l'attente de l'arrivée d'une structure mobile d'urgence et de réanimation (Smur).
Nous avons ensuite mis en place un protocole de fonctionnement restreint lorsque la situation des ressources humaines (RH) nécessite une régulation de la prise en charge au sein des urgences de Manosque, c'est-à-dire un maintien de l'accueil et des prises en charge des urgences vitales. À cette fin, le plateau technique de l'établissement reste accessible vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
Par ailleurs, une maison médicale de garde est installée à côté du centre hospitalier, permettant une prise en charge de la population les dimanches et les veilles de jours fériés.
Nous avons également débloqué des financements pour faciliter le déploiement de dispositifs, tels qu'un véhicule léger infirmier dans les périodes les plus tendues – il est installé dans le secteur de Castellane et mobilisé par le Samu des Alpes-de-Haute-Provence –, ou encore le déploiement d'une équipe dédiée au transport infirmier interhospitalier.
Enfin, car il nous faut surtout recruter plus de professionnels pour retrouver un fonctionnement normal, nous avons financé notamment un poste de chargé de mission pour travailler sur le recrutement et les leviers d'attractivité RH du territoire. Une vaste campagne de communication a été lancée pour diffuser les offres d'emploi en tension au sein du groupement hospitalier de territoire (GHT), ainsi qu'une vidéo promotionnelle à l'attention des praticiens hospitaliers et des internes.
Je crois par ailleurs savoir qu'un rendez-vous est prévu dans le courant du mois de novembre avec le cabinet du ministre Aurélien Rousseau, rendez-vous auquel vous participerez. Cela montre bien l'engagement de notre ministère sur ce dossier et notre volonté de le suivre dans la durée.
Non, comme vous l'avez souligné, le provisoire ne doit pas devenir la norme. C'est le sens de l'action que nous menons et que nous souhaitons poursuivre à vos côtés.
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