Projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
M. Ahmed Laouedj. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, tout en appelant à un choc d’offre, le Premier ministre a rappelé que pour répondre à l’urgence de la crise du logement, il convenait d’activer à la fois le levier de l’offre et celui de la demande.
Pour autant, le compte n’y est pas. L’année 2023 a été marquée par l’aggravation alarmante de cette crise et par l’explosion de la bombe sociale du logement. Quant à l’année 2024, elle débute d’une façon très inquiétante. La volonté de Gabriel Attal d’intégrer les logements intermédiaires au décompte de la loi SRU revient à détricoter cette dernière, qui est pourtant emblématique de l’ambition républicaine de mixité sociale.
Force est de constater que la plupart des politiques de soutien successives ont eu pour effet collatéral de faire grimper les prix. Un cercle vicieux s’est formé, difficile à briser : les 200 000 places d’hébergement d’urgence sont saturées ; les demandes de logements sociaux ont atteint le chiffre record de 2,6 millions, tandis que leur production s’effondre ; la construction de logements neufs a ralenti, cependant que la location touristique s’est amplifiée et que les taux d’intérêt ont augmenté.
Ce n’est d’ailleurs pas en révisant les critères du diagnostic de performance énergétique afin de remettre 140 000 passoires thermiques sur le marché locatif que l’on résoudra une crise dont les fondations sont autant complexes que multifactorielles.
Monsieur le ministre, comment se fait-il que, pour répondre à la crise agricole comme à celle du logement, le Gouvernement fasse de la nécessaire transition écologique la principale victime de son action ? Ces politiques court-termistes de la rustine ne peuvent pas, et ne doivent pas, être acceptables sur le long terme.
Aujourd’hui, néanmoins, nous sommes réunis pour traiter l’une des problématiques récurrentes du mal-logement : l’habitat dégradé et indigne.
Lors de mon intervention durant le premier examen de ce projet de loi en séance publique, j’avais rappelé que 40 % des Français habitaient dans un immeuble collectif. La qualité de cet habitat doit donc devenir une priorité de notre action politique, puisque l’habitat dégradé est un phénomène silencieux et massif encore largement méconnu, qui ne concerne pas seulement quelques villes pauvres ou quelques quartiers prioritaires.
Il s’agit non seulement d’un stock de logements à réhabiliter, mais d’un flux qui se renouvelle : de nouveaux logements se dégradent tout en restant habités, parce que d’autres logements abordables manquent et que les personnes exclues sont toujours plus nombreuses.
Pourtant, depuis trente ans, de nombreuses lois relatives à l’habitat dégradé ont été votées. De nouveaux outils ont été institués, mais ils demeurent parfois mal connus, et leur utilisation est rendue de plus en plus complexe du fait de leur cumul.
Ce projet de loi est présenté comme une boîte à outils permettant d’améliorer et de compléter les mécanismes déjà existants. Il poursuivrait une philosophie selon laquelle il faut anticiper, simplifier et raccourcir les délais.
Toutefois, ce texte dont l’objectif est d’améliorer l’efficacité et la rapidité de l’action publique dans la lutte contre l’habitat indigne et dégradé ne constitue pas la grande loi logement que l’on attend. Il s’agit plutôt d’un rendez-vous manqué, que le Gouvernement a reporté au mois de juin prochain. Je l’affirme, nous serons plus qu’attentifs à ce que ce rendez-vous soit honoré.
Néanmoins, nous devons nous retrouver sur l’essentiel, c’est-à-dire sur le fait d’apporter des outils aux maires et de proposer des solutions aux victimes de l’habitat indigne.
En ce sens, le groupe RDSE ne peut que se féliciter des moyens supplémentaires donnés aux maires pour prévenir la dégradation de l’habitat, ainsi que du renforcement de la lutte contre les marchands de sommeil. Je pense notamment au diagnostic structurel de l’immeuble collectif, réalisé tous les dix ans, qui permettra d’anticiper des désordres irrémédiables. Il a été étendu non seulement à l’habitat dégradé, notion dont la définition complexe ne couvre pas toutes les situations, mais aussi aux centres anciens.
De même, je salue le retour de la commune comme échelon de droit commun pour l’instruction du permis de louer, ainsi que la possibilité de mettre gratuitement à la disposition des communes les biens confisqués aux marchands de sommeil pour y réaliser des logements.
Néanmoins, mon groupe regrette que la commission mixte paritaire n’ait pas jugé pertinent de conserver toutes les dispositions introduites en séance publique sur son initiative : d’une part, nous proposions de rendre conformes à un modèle type les avis d’appels de fonds établis par le syndic et adressés aux copropriétaires ; d’autre part, nous étions convenus d’obliger le syndic à donner sans délai au président du conseil syndical, et ce dès la désignation de ce dernier, un accès numérique aux comptes bancaires de la copropriété, afin de permettre leur consultation. Ces dispositions, prolongeant les travaux du Sénat, nous semblaient importantes afin que les copropriétaires soient mieux informés de leurs droits et puissent agir le plus possible en amont de la dégradation du bâti.
Toutefois, parce que ce projet de loi va dans le bon sens, parce que l’intervention plus précoce des pouvoirs publics est synonyme de moindres coûts et d’une meilleure anticipation des relogements, mon groupe votera unanimement en faveur du texte issu des travaux de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
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