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Proposition de loi permettant la réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce :

Mme Maryse Carrère. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, chacun le sait ici, ce serait une erreur de voir dans ce texte à l'apparence technique une loi sans intérêt véritable.

En écho aux écrits du philosophe Gilbert Simondon, les objets techniques ne doivent nullement être dévalués comme des choses de second rang : ils sont la condition du bon fonctionnement d'un système entier, en ce qu'ils permettent son accomplissement cohérent.

De ce point de vue, il ne fait aucun doute que la proposition de loi de notre collègue Nathalie Goulet contribue à assurer la cohérence de notre législation sur un point dont les enjeux ne sauraient être minorés.

En effet, comme les orateurs précédents l'ont indiqué, la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite « loi Pacte », est venue, sans en avoir l'intention, priver d'éligibilité les membres en exercice et anciens membres de tribunaux de commerce dont le collège devrait être prochainement renouvelé, ainsi que les membres des tribunaux limitrophes.

Suivant les estimations indiquées, cela représenterait entre 450 et 500 juges consulaires, sur les 793 juges ne pouvant être réélus. Une telle conséquence n'avait naturellement pas été souhaitée par le législateur, d'autant que, par tradition, les juges du tribunal de commerce sont des magistrats élus par leurs pairs parmi les commerçants ou dirigeants des sociétés commerciales.

Les tribunaux de commerce sont parmi les juridictions françaises les plus ancrées dans leur particularisme historique. Il est impératif de ne pas nuire au bon fonctionnement de cette institution, donc de ne pas perdre autant d'hommes et de femmes ayant déjà montré leur compétence et leur intérêt pour leur juridiction.

Cette proposition de loi vise donc, en son article 1er, à modifier l'article L. 723-4 du code de commerce désignant les personnes éligibles aux fonctions de juge d'un tribunal de commerce, en y intégrant les membres en exercice et anciens membres.

Nous ne pouvons que suivre l'évolution souhaitée, puisque, actuellement, à la lecture du code, ne sont éligibles que les juges d'un tribunal de commerce qui souhaitent être candidats dans un autre tribunal de commerce non limitrophe du tribunal dans lequel ils ont été élus. Cela provoquerait les conséquences que nous disions précédemment. Une réforme est donc nécessaire.

Nous saluons également le travail effectué par notre commission des lois, qui est allée au-delà du texte initial en rendant également éligibles les anciens juges, de sorte que soient éligibles les membres en exercice et anciens membres des tribunaux de commerce, dans quelque juridiction qu'ils aient exercé.

Cette proposition de loi donne aussi l'occasion de compléter et d'ajuster certaines dispositions, notamment concernant le délai de viduité.

Le Conseil d'État est venu offrir une interprétation des dispositions de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, dite « loi J21 », et de la loi Pacte s'agissant de la limitation à cinq mandats pouvant être exercés par un juge dans un même tribunal. Suivant sa lecture des textes, l'inéligibilité ne s'appliquerait que si les mandats ont été continus.

Or, comme l'ont rappelé les précédents orateurs, un tel dispositif demeurera inefficace au regard de l'objectif fixé d'éviter toute forme de professionnalisation de la fonction de juge consulaire. Nous rejoignons donc la position de la commission des lois limitant strictement à cinq le nombre de mandats pouvant être exercés par un juge dans un même tribunal.

Nous considérons également comme opportuns les ajustements effectués sur les conditions imposées par la loi pour faire partie du collège électoral des juges consulaires.

Vous comprendrez, au regard de ces éléments, que notre groupe se prononcera unanimement en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – MM. Thani Mohamed Soilihi et Guy Benarroche, ainsi que Mme Viviane Artigalas, applaudissent également.)

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