Proposition de loi tendant à prévenir les usages dangereux du protoxyde d'azote
Le confinement a accru la prévalence des comportements addictifs dans leur ensemble, y compris l'usage détourné du protoxyde d'azote, comme le relève l'Association française des centres d'addictovigilance dans son bulletin de novembre 2020.
Le déconfinement a quant à lui eu pour effet de rendre cet usage plus visible, dans la mesure où il occasionne divers troubles à l'ordre public, à la tranquillité, à la salubrité et à la sécurité. Ces troubles se manifestent par le bruit et par l'abandon de cartouches et de ballons dans les rues ; on peut encore relever, tout récemment, l'explosion d'une voiture occupée par cinq adolescents qui consommaient du protoxyde d'azote.
De nombreux maires nous alertent régulièrement sur cette situation ; certains d'entre eux ont pris des arrêtés interdisant la consommation ou la vente de protoxyde d'azote sur le territoire de leur commune, sans véritable effet.
L'Assemblée nationale a souscrit à l'économie générale du texte et a décidé de maintenir en grande partie les éléments introduits par le Sénat ; avec le groupe du RDSE, je m'en réjouis.
Elle a toutefois adopté plusieurs modifications à l'article 2, notamment en introduisant un plafonnement de la quantité maximale de protoxyde d'azote pouvant être vendue aux particuliers, plafond qui sera fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé et de l'économie. Cette mesure va certes dans le bon sens.
Il convient toutefois de s'assurer que la restriction posée n'est pas excessive au regard de l'objectif recherché. Comme l'a rappelé notre rapporteure Jocelyne Guidez, cet arrêté ministériel ne pourra être pris qu'après avis de la Commission européenne. Le plafond sera par ailleurs déterminé au terme d'une réflexion conjointe avec les acteurs concernés. Ces éléments nous semblent de nature à garantir que ce plafonnement sera raisonnable.
L'Assemblée nationale a également élargi aux débits de boissons temporaires l'interdiction de vente ou d'offre de protoxyde d'azote aux personnes majeures. Cette extension de l'interdiction au-delà des débits de boissons initialement visés nous semble pertinente et conforme à l'esprit du texte, tout comme l'interdiction de la vente et de la distribution de tout produit spécifiquement destiné à faciliter l'extraction de protoxyde d'azote afin d'en recevoir des effets psychoactifs.
L'article 2 apporte en outre une clarification : c'est bien la dangerosité de l'usage détourné du protoxyde d'azote et non l'usage du gaz en lui-même qui doit faire l'objet d'un étiquetage dédié sur chaque unité de conditionnement. En effet, dans des conditions normales d'utilisation, le gaz est employé à des usages médicaux, culinaires et industriels qu'il convient bien évidemment de préserver.
Ce même article prévoit que la constatation des infractions aux interdictions de vente pourra être aussi réalisée par les agents de police municipale, les gardes champêtres, ainsi que les agents de surveillance de la Ville de Paris. Cette extension va dans le bon sens ; encore faut-il que les forces de l'ordre soient présentes en effectifs suffisants, ce qui n'est pas le cas dans bon nombre de nos territoires.
L'article 2 bis permettait de renforcer les obligations applicables aux intermédiaires numériques d'informer sur les interdictions de vente aux mineurs de certains produits. Il a été supprimé par les députés. Nous le déplorons, car l'information et la responsabilisation des usagers restent, en matière de santé, les premières des priorités.
Enfin, les députés ont modifié l'intitulé du texte : cette proposition de loi tendait auparavant « à protéger les mineurs des usages dangereux du protoxyde d'azote » ; elle tend désormais « à prévenir les usages dangereux du protoxyde d'azote ». En effet, cet intitulé élargi permettra aussi de mieux protéger les jeunes majeurs : nous ne pouvons qu'accueillir favorablement ce progrès.
Cette proposition de loi constitue une belle avancée, que nous saluons sans réserve. Elle contribue à la sensibilisation des jeunes sur les conduites addictives ; elle permet d'informer sur la dangerosité de ce produit détourné de son usage ; elle punit la provocation d'un mineur à faire un usage détourné d'un produit de consommation courante pour en obtenir des effets psychoactifs ; enfin, elle interdit sa vente et son offre à des mineurs, dans les commerces physiques comme en ligne.
Détourner un produit de consommation de son usage est une pratique qui ne concerne pas seulement le protoxyde d'azote. Malheureusement, l'innovation en la matière est sans limites ! Nous ne pouvons qu'appeler le Gouvernement à aller encore plus loin dans les domaines de la prévention, de l'aide à la parentalité et de la sensibilisation dès le plus jeune âge.
Pour l'heure, au regard de l'équilibre trouvé dans ce texte, le groupe du RDSE votera en faveur de cette proposition de loi, avec enthousiasme et sans réserve. (Mme Valérie Létard, M. François Patriat et Mme la rapporteure applaudissent. – M. Jean-Pierre Grand approuve.)
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