Proposition de loi visant à limiter l'engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée - Deuxième lecture
M. Christian Bilhac. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la proposition de loi visant à limiter l'engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée revient devant la Haute Assemblée en deuxième lecture, après que nos collègues députés ont encore étendu sa portée.
Son objectif est d'arrêter l'expansion de la pratique de l'engrillagement, laquelle représente aujourd'hui 3 000 à 4 000 kilomètres linéaires de clôtures érigées sur des propriétés privées. Ces dernières empêchent à la fois la circulation de la faune sauvage, son brassage génétique et une gestion équilibrée de la biodiversité de nos territoires.
L'image que cette pratique donne de la chasse est loin d'être éthique : l'engrillagement, ce sont des animaux engraissés tués sans limite de nombre, toute l'année, dans des propriétés fermées. Telle n'est pas ma conception de la chasse.
À cet égard, il était urgent de mettre fin au privilège de l'enclos.
L'article L. 424-3 du code de l'environnement distingue deux formes de chasse sur les propriétés privées.
Le premier statut est celui de l'enclos cynégétique, apparenté au domicile. Il est assorti d'un droit de chasse dérogatoire permettant au propriétaire de chasser ou de faire chasser le gibier à poil, de pratiquer l'agrainage ou l'affouragement, tout en l'exemptant de plan de chasse et d'indemnisation financière des dégâts du grand gibier. C'est précisément le privilège de l'enclos.
Le second statut est celui des établissements professionnels de chasse à caractère commercial, ou parcs de chasse.
Par son article 1er, qui modifie la trame verte, cette proposition de loi supprime ce privilège et encadre les clôtures érigées par les parcs de chasse. L'article L. 371-1 du code de l'environnement est ainsi modifié pour réglementer les clôtures, qui devront désormais respecter plusieurs conditions : permettre en tout temps la libre circulation des animaux sauvages ; ne pas être enterrées dans le sol ou dépasser 1,20 mètre de hauteur ; être constituées de matériaux naturels ou traditionnels, tels que définis par le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet).
Je suis satisfait que l'Assemblée nationale ait élargi le périmètre d'application de ces nouvelles règles aux zones naturelles et forestières identifiées par les plans locaux d'urbanisme (PLU) ou, à défaut, dans les espaces naturels, les trames vertes ne couvrant pas tous les espaces protégés subissant l'engrillagement.
Seront désormais autorisées les clôtures posées autour de parcelles agricoles, pour préserver les récoltes, ou nécessaires à la protection des régénérations forestières, ainsi que les clôtures d'intérêt public.
Pour ce qui concerne les clôtures existant au 1er janvier 2021, l'Assemblée nationale a avancé la date limite de mise en conformité au 1er janvier 2027. Cette mesure, qui va dans le bon sens, est assortie d'un certain nombre d'exemptions : les clôtures érigées dans un cadre scientifique, celles des domaines nationaux ou celles qui ont été réalisées avant la publication de la loi de 2005 relative au développement des territoires ruraux, la preuve devant être apportée par tous moyens.
Entre autres avancées, je relève l'extension, aux clôtures réalisées moins de trente ans avant la publication du présent texte, de l'obligation de conformité aux normes environnementales et de protection des paysages. Les députés ont estimé que la date de 2005 limitait les effets de la loi, la majorité des clôtures hermétiques ayant été édifiées dans les années 80.
L'article 1er quinquies crée des sanctions pénales : engrillager ou ne pas mettre en conformité les clôtures sera puni de trois ans de prison et de 150 000 euros d'amende.
L'article 1er sexies prévoit le contrôle par des agents des fédérations de chasse de la conformité des clôtures et des plans de gestion des enclos.
À l'article 2, l'Assemblée nationale a rétrogradé la contravention prévue de la cinquième à la quatrième classe, votée par le Sénat, pour intrusion dans une propriété rurale ou forestière, passible de 1 500 euros d'amende. En effet, la nature n'appartient pas à tout le monde !
Après de longs débats, à l'article 5, les députés ont interdit l'agrainage et l'affouragement en enclos dans les espaces naturels définis, sauf ceux à visée scientifique. Toutefois, cette interdiction a été assouplie par un amendement de notre rapporteur, adopté en commission.
En vertu dudit amendement, ces pratiques sont interdites dans les espaces clos empêchant complètement le passage des animaux non domestiques, sauf exception inscrite au schéma départemental de gestion cynégétique (SDGC). Ces précisions sont renvoyées aux décrets d'application.
Avec les autres membres de mon groupe, je voterai en faveur de ce texte, dont les avancées répondent en grande partie aux attentes que j'ai exprimées ici même en première lecture. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.)
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