Proposition de loi visant à lutter contre la fraude au compte personnel de formation et à interdire le démarchage de ses titulaires
Mme Véronique Guillotin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le compte personnel de formation a fait l'objet d'une réforme en 2018, dans le cadre de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel.
L'objectif, que nous partagions, était de rendre les droits à la formation plus lisibles et plus accessibles, en créant notamment une plateforme internet sur laquelle chaque personne pourrait connaître le montant de ses droits – désormais visibles en euros –, choisir et payer directement sa formation, sans intermédiation.
Lancée à la fin de 2019, la plateforme Mon compte formation a permis l'activation de 19 millions de profils et l'augmentation très nette du nombre d'entrants en formation dans toutes les catégories professionnelles, ce qui est à souligner. Les femmes, plus souvent à temps partiel, bénéficient de l'alignement des droits, avec un compte alimenté de 500 euros par an pour tous les salariés effectuant au moins un mi-temps, et 800 euros pour les moins qualifiés ou en situation en handicap.
Cette réforme, que nous jugions souhaitable à l'époque et dont nous constatons aujourd'hui le succès, a rendu les Français plus libres d'évoluer professionnellement. Nous savons à quel point la question de la formation est centrale dans la recherche de l'adéquation entre les profils des demandeurs d'emploi et les offres présentes sur le marché du travail.
Mais tout changement entraîne des effets de bord et nous sommes en plein dedans : la montée en puissance du CPF s'est en effet accompagnée d'une hausse massive des fraudes, des tentatives de fraude, ainsi que d'un harcèlement par appels téléphoniques, par SMS, par courriels ou par démarchages sur les réseaux sociaux, comme l'ont souligné les orateurs précédents.
Le phénomène a pris une ampleur considérable depuis plusieurs mois – je crois que beaucoup d'entre nous peuvent le confirmer pour l'avoir également subi. Au-delà des pratiques commerciales agressives, voire abusives, des informations erronées sont véhiculées, induisant en erreur les titulaires des comptes ou les poussant à acheter des formations contre leur gré.
C'est aujourd'hui une nuisance réelle, qui a envahi le quotidien des Français et qui met en péril la crédibilité du dispositif et du secteur de la formation professionnelle.
Tracfin évalue la fraude à 43 millions d'euros en 2021. Nous devons y mettre un terme au plus vite. Cette proposition de loi, nécessaire et bienvenue, vise à rappeler que le CPF est un outil destiné à ceux qui le détiennent et non aux organismes de formation. Les Français doivent impérativement garder la main sur leurs droits.
Les dispositifs jusqu'ici mis en place pour contrôler la qualité des formations et sanctionner les manquements et les fraudes n'ont malheureusement pas permis de lever toutes les difficultés. Il s'agit donc de mettre en place des barrages filtrants, afin de compliquer les contournements du dispositif, à défaut de pouvoir totalement les supprimer.
Pour ce faire, cinq solutions concrètes ont été retenues.
Premièrement : l'interdiction, avec amendes dissuasives, comme vous l'avez rappelé, madame la ministre, de toute prospection commerciale visant les titulaires d'un CPF, à l'exception des sollicitations intervenant dans le cadre de prestations en cours.
Deuxièmement : la sécurisation de l'échange d'informations entre les acteurs mobilisés dans la lutte contre la fraude au CPF.
Troisièmement : le renforcement des pouvoirs de recouvrement des indus de la Caisse des dépôts et consignations.
Quatrièmement : le renforcement des modalités de contrôle du référencement des organismes de formation sur Mon compte formation.
Cinquièmement, enfin : l'encadrement du recours à la sous-traitance des organismes de formation pour imposer aux sous-traitants les mêmes exigences et donner à la Caisse des dépôts et consignations les moyens de contrôle, de vérification et d'intervention adéquats.
Des ajustements sont nécessaires et les solutions proposées ici semblent consensuelles. Cette proposition de loi a été adoptée voilà quelques semaines à l'Assemblée nationale ; si nous l'adoptons à notre tour sans modification – et nous avons bien entendu le message (Sourires.) –, elle pourra s'appliquer sans délai. Pour cette raison, pour que ces nuisances cessent au plus vite, le groupe du RDSE votera en faveur de ce texte sans modification. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et RDPI. – Mme Marie-Pierre Richer applaudit également.)
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