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Question d'actualité sur l'emploi des jeunes

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme Nathalie Delattre. Nos jeunes seront-ils les victimes collatérales de la crise sanitaire que nous traversons ? Ils sont 800 000 à s'apprêter à entrer dans la vie active, mais ils craignent d'être une génération sacrifiée, la variable d'ajustement d'un marché de l'emploi totalement déstructuré.

Les difficultés économiques qui touchent nombre de nos TPE et PME, qui sont les premiers employeurs, par contrats d'apprentissage ou de professionnalisation, de notre pays, fragilisent ces voies d'insertion professionnelle. Aussi l'annonce par le Gouvernement d'une aide à l'embauche d'un montant variant entre 5 000 et 8 000 euros selon l'âge de l'apprenti, disponible jusqu'en février 2021, est-elle bienvenue.

Toutefois, cette béquille financière ne garantit pas le maintien dans l'emploi des jeunes ; au contraire, elle risque de créer un effet d'aubaine en trompe-l'œil.

Il faut donc assortir ces aides d'une promesse de contrats plus sécurisants. Il faut également que les entreprises puissent bénéficier des mêmes aides quand elles concluent des contrats de professionnalisation avec des personnes de plus de 26 ans. Enfin, celles qui parviendront à embaucher nos jeunes de moins de 30 ans via des contrats plus classiques doivent pouvoir bénéficier de l'exonération des charges.

Il faut aussi lever les freins à l'embauche par des mesures complémentaires de celles concernant l'emploi. Je pense notamment à l'examen du permis de conduire. J'ai écrit vendredi au ministre de l'intérieur pour l'alerter sur la situation catastrophique qui se profile dans plusieurs départements. En Gironde, le confinement a créé un stock de plus de 6 000 examens en attente, qui s'accroît chaque jour. Le nombre d'examinateurs absents pour vulnérabilité, les mesures d'hygiène et l'absence de sessions complémentaires amènent aujourd'hui des jeunes à refuser des offres d'emploi, faute de permis de conduire : la responsabilité de cette situation incombe à un système en panne qui montre là toutes ses failles. Les jeunes ne peuvent pas passer le permis en temps et en heure, et ils le paient cash !

Madame la ministre, si nous ne pouvons pas nous serrer la main, nous devons du moins nous serrer les coudes pour nos enfants et construire avec l'ensemble des partenaires de l'emploi un plan ambitieux pour l'insertion professionnelle des jeunes. Le temps presse ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail.

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Madame la sénatrice Delattre, nous partageons tous ici, me semble-t-il, une conviction très forte : il n'est pas question d'accepter qu'une génération soit sacrifiée ! Ce n'est pas possible humainement, pour nos enfants et nos petits-enfants. Ce n'est pas possible économiquement, eu égard à la perte de compétences que cela représenterait. Ce n'est pas possible socialement, du point de vue du pacte intergénérationnel qu'évoquait Gabriel Attal à l'instant. Enfin, ce n'est pas possible politiquement.

Il nous faut donc agir, sauf à courir un grave risque, compte tenu de la crise économique et sociale qui suit la crise sanitaire.

Un pays qui n'investit plus pour sa jeunesse n'investit plus dans son avenir. Nous n'investissons pas seulement pour les jeunes : nous le faisons pour tous les Français. Il importe de prendre conscience que l'investissement dans la jeunesse que le Président de la République a appelé de ses vœux concerne tout le monde.

Alors, que faire ? Vous avez évoqué la première étape de notre action : des mesures en faveur de l'apprentissage ont été prises en urgence. En effet, la concertation que j'avais menée avec les partenaires sociaux à la demande du Premier ministre et du Président de la République avait déjà porté ses fruits et il fallait aller vite, dans la mesure où la signature des contrats d'apprentissage répond à une certaine saisonnalité. Le montant de cette prime à l'embauche en apprentissage – 5 000 euros pour un jeune de moins de 18 ans, 8 000 euros pour un jeune majeur – correspond, à quelques euros près, au coût d'un contrat d'apprentissage. Nous envoyons ainsi aux entreprises le message suivant : dans le contexte actuel, il faut continuer à former, à investir dans la jeunesse, à créer les compétences de demain ; nous comprenons la difficulté de la situation et l'État assumera donc, pour la première année d'apprentissage, la quasi-intégralité des coûts.

Depuis la réforme de l'apprentissage, une aide à l'obtention du permis du conduire est incluse dans le parcours contractualisé d'accompagnement adapté vers l'emploi et l'autonomie (Pacea). Avec M. le ministre de l'intérieur, nous nous intéressons beaucoup à ce sujet clé pour l'autonomie des jeunes. Il peut être traité au sein d'un plan de relance.

En tout cas, madame la sénatrice, vous avez raison : serrons-nous les coudes ! Investir dans la jeunesse est bien une priorité. (Applaudissements sur des travées des groupes LaREM et RDSE.)

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