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Question d'actualité sur la réforme des retraites

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

 

M. Jean-Marc Gabouty. Monsieur le Premier ministre, monsieur le secrétaire d'État chargé des retraites, on peut adhérer aux grands principes du projet de réforme des retraites : régime universel avec suppression des régimes spéciaux, système à points, équilibre financier.

On peut aussi comprendre la nécessité de mesures destinées à assurer, à court et moyen termes, l'équilibre du régime actuel, avec ou sans mesures d'âge. On peut également imaginer utiliser le Fonds de réserve des retraites ou accélérer le rythme de la réforme Touraine sur la durée de cotisation. Bien sûr, il faut aussi prévoir le financement de la phase de transition.

Mais, en ce qui concerne la réforme systémique, qui prendra pleinement effet en 2037, donc dans dix-sept ans, je m'interroge sur la compatibilité d'un âge d'équilibre prédéfini avec un système à points.

Dans un tel système, on conserve une date à partir de laquelle on peut faire valoir ses droits à la retraite – 62 ans –, et le montant de la pension est calculé en multipliant le nombre de points acquis tout au long de la carrière, avec d'éventuelles bonifications, par la valeur du point. C'est une forme d'individualisation de la retraite. Mettre en place un système par points cotisés fait disparaître la notion de retraite à taux plein et relativise les critères d'âge et de durée de cotisation.

Dans ce cadre, l'introduction d'un deuxième âge de référence, avec un mécanisme de bonus-malus, ne répond pas, me semble-t-il, aux objectifs de clarté, de simplicité et de justice ; elle nuit à la compréhension de la réforme.

Peut-on envisager de conserver dans le projet de loi sur la réforme systémique l'impératif d'équilibre financier, tout en effaçant la référence à un âge d'équilibre prédéterminé, à mon sens incompatible avec la philosophie d'un régime à points ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Avant de vous répondre, monsieur le sénateur, je tiens à présenter mes excuses à M. Menonville, car je suis arrivé en retard pendant qu'il posait sa question, ce qui était incorrect.

Vous m'interrogez sur le futur système universel de retraite que nous voulons construire.

D'abord, je vous rappelle – en écho aussi à la question de M. Savary – que nos discussions et vos questions, bien légitimes, portent sur un projet de loi qui n'a pas encore été présenté en conseil des ministres. Il est en préparation et il a été soumis, conformément aux règles constitutionnelles, au Conseil d'État et à un certain nombre d'organismes chargés de formuler des avis.

Le projet de loi sera soumis au conseil des ministres le 24 janvier prochain, dans les conditions prévues par les textes, avant d'être déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale. Nous pourrons alors engager, article par article, la discussion précise que, vous comme moi, monsieur le sénateur, nous attendons avec impatience.

N'allons donc pas plus vite que la musique, s'agissant de discussions pointues sur les articles d'un texte qui n'a pas encore été présenté en conseil des ministres. (Murmures sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)

M. Pierre-Yves Collombat. Et la procédure accélérée ?

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je rappelle à ceux qui l'auraient oublié que les précédentes réformes des retraites intervenues sous forme de loi ont toutes été approuvées – sauf erreur de ma part – au terme d'une procédure dite accélérée. Il n'y a rien là d'exceptionnel : c'est la règle en la matière.

Ensuite, monsieur le sénateur, vous m'avez interrogé sur la conciliation d'un système par répartition à points avec la notion d'âge d'équilibre.

Oui, l'âge d'équilibre sera l'un des éléments de pilotage du futur système, en vue de l'équilibrer, par les instances de gouvernance qui seront déterminées par la loi. On comprend bien l'attachement, que j'ai exprimé en ce qui me concerne, au principe de l'équilibre d'un système de retraite, singulièrement d'un système par répartition. L'âge d'équilibre sera l'un des paramètres dans ce cadre.

Cet âge d'équilibre, vous l'avez dit, n'est pas l'âge légal, qui est l'âge à partir duquel on peut faire valoir ses droits à la retraite. L'âge d'équilibre sera, au fond, l'âge de départ à taux plein.

Comme le Président de la République s'y était engagé, nous ne supprimerons pas la notion d'âge légal, car nous pensons que les Français doivent pouvoir continuer à faire valoir leurs droits à la retraite à 62 ans. Il leur sera toujours loisible de faire, et cela sera même opportun pour certains d'entre eux. Pourquoi voudrions-nous priver les Français de cette possibilité ?

Mais nous voulons aussi créer l'âge d'équilibre, de manière à inciter nos concitoyens à travailler – c'est vrai – plus longtemps pour – c'est vrai – équilibrer le système de retraite par répartition. Il n'y a là ni gros mots ni scandale : c'est ce qui se passe dans tous les pays du monde ! (Murmures prolongés sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)

Nous voulons le faire non pas en utilisant l'arme, si j'ose dire, de l'âge légal, qui est aveugle et concerne tout le monde, mais en créant une incitation qui prendra en compte la réalité des parcours professionnels : non pas l'appartenance à telle ou telle entreprise, à tel ou tel statut, mais bien la réalité du parcours professionnel. Ainsi, la pénibilité, le handicap, bien entendu, ou les carrières longues seront pris en compte dans la détermination de l'âge de départ à taux plein.

De toutes ces questions, passionnantes et sensibles, nous aurons l'occasion de débattre, à l'Assemblée nationale puis au Sénat, sur la base de toutes les données nécessaires.

Mesdames, messieurs les sénateurs, ce débat sera riche et, j'en suis certain, intense. Je pense qu'il permettra l'élaboration collective d'une loi bonne et juste, ce qui est la raison d'être d'un Parlement : une loi grâce à laquelle l'ensemble des Français, quels que soient leur métier et leur statut, pourront envisager la fin de leur activité professionnelle et leur retraite avec sérénité ! (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM. – Mme Élisabeth Doineau et M. Joseph Castelli applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour la réplique.

M. Jean-Marc Gabouty. Monsieur le Premier ministre, je vous remercie de cette réponse. Je comprends bien vos explications, mais il reste que certains effets peuvent paraître curieux. Ainsi, au nom de quoi, dans un système à points, un salarié prenant sa retraite entre l'âge légal et l'âge d'équilibre serait-il pénalisé par un malus ?

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