Débat sur le thème : « Enseignement privé sous contrat : quelles modalités de contrôle de l’État et quelle équité des moyens vis-à-vis de l’enseignement public ? ».
M. Bernard Fialaire. Le lundi 16 octobre 2023, à 11 heures, j’avais un rendez-vous pris longtemps à l’avance dans un collège privé sous contrat de mon territoire. Or il se trouve que, ce jour-là, était prévu un hommage, à 14 heures, au professeur Dominique Bernard, disparu trois jours auparavant. Je me suis enquis auprès du personnel de cet établissement dans conditions dans lesquelles cet hommage national serait rendu. On m’a répondu qu’il n’aurait pas lieu parce qu’il avait été remplacé par une prière le matin même. Je souhaite donc savoir si ce type d’initiatives prises de bonne foi, pour ainsi dire (Sourires sur les travées des groupes du RDSE et SER.), est connu, courant, recensé et accepté.
Pour ma deuxième question, je souhaite revenir sur le financement par les communes des écoles privées installées sur leur territoire et sur la contribution par élève, fondée sur la moyenne des dépenses des élèves scolarisés dans le public. Lorsqu’une petite commune voit partir des élèves des classes de l’école publique vers l’établissement privé, pour des raisons qui peuvent ne pas dépendre d’elle – je pense par exemple à de l’absentéisme non remplacé, ce que les membres du Gouvernement peuvent comprendre –, la commune est immédiatement et mathématiquement pénalisée, puisque les charges sont alors divisées par un nombre moins important d’élèves. Or le coût du chauffage, qu’il y ait 20 élèves ou 25 élèves dans une classe, reste le même ! La commune subit donc une double peine : elle paie pour davantage d’élèves et, surtout, elle paie plus cher par élève. Ne pourrait-on pas réviser le mode de calcul, en se fondant sur le nombre de places proposées par l’école et non sur le nombre de places occupées ? (Applaudissements sur les travées des groupes du RDSE et SER.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Nicole Belloubet, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Techniques, ces dernières questions…
M. Pierre Ouzoulias. Vous êtes au Sénat, madame la ministre ! (Sourires.)
Mme Nicole Belloubet, ministre. Absolument, je reconnais bien là la technicité des sénateurs et sénatrices !
En évoquant la façon dont un établissement privé a rendu hommage à Dominique Bernard, vous soulevez la question de ce qui relève du caractère propre d’un l’établissement. Le ministère a diffusé à l’ensemble des réseaux d’enseignement privé sous contrat des recommandations pour organiser un temps de recueillement et d’hommage à Dominique Bernard, comme dans les établissements publics. Toutefois, en vertu de leur caractère propre, les établissements privés sous contrat peuvent bien entendu s’exprimer librement sur tout ce qui ne relève pas du strict respect des programmes scolaires ou des valeurs de la République. Tel est le sens de la loi Debré. Par conséquent, ils ne pouvaient pas être juridiquement contraints d’organiser un hommage national à Dominique Bernard selon les modalités que nous précisions dans nos recommandations. Dans ce cadre, la prière ne pouvait pas avoir lieu sur les temps d’enseignement, car le contrat n’eût alors pas été respecté, elle ne pouvait être organisée que dans le cadre du caractère propre, donc optionnel, lié à l’enseignement religieux. Telle peut être la ligne de partage.
Les écoles et établissements scolaires, qu’ils soient publics ou privés, sont évidemment tenus de faire partager à l’ensemble de leurs élèves, je l’ai dit tout à l’heure, les valeurs de la République, dont la laïcité, que tous ces élèves doivent apprendre à respecter. Ils sont tenus de le faire dans le cadre des enseignements qu’ils doivent dispenser. Les établissements sont également dans l’obligation de veiller au respect de la liberté de conscience, ce qui signifie que cette prière ne pouvait être que facultative, l’instruction religieuse devant toujours rester facultative.
M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre.
Mme Nicole Belloubet, ministre. Je reviendrai plus tard sur la question du financement.
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