Projet de loi relatif à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement
M. Ahmed Laouedj. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, 40 % des Français habitent un immeuble collectif. La qualité de cet habitat doit être une priorité de notre action politique.
Pourtant, l'habitat dégradé est un phénomène silencieux et massif, encore largement méconnu, qui n'est pas le problème de quelques villes pauvres ou quartiers prioritaires.
Je souhaite à cet égard saluer l'initiative de notre assemblée, qui a mis en œuvre une consultation des élus locaux sur la lutte contre l'habitat dégradé afin de mieux connaître les besoins de nos maires et leurs difficultés, et de recueillir leur avis et leurs suggestions sur les principales dispositions de ce texte.
Ainsi, le projet de loi qui nous a été soumis a pu être amendé de manière à le rendre plus juste et efficace, ainsi qu'à replacer avec pertinence les maires au cœur des politiques publiques du logement.
De fait, 58 % des maires interrogés ont ainsi déclaré avoir une ou plusieurs copropriétés dégradées dans leur commune. Deux tiers d'entre eux estiment que c'est une question importante, voire très importante.
Les copropriétés se retrouvent souvent en difficulté et se dégradent au point de nécessiter l'intervention des pouvoirs publics.
Leur rénovation est freinée par des difficultés inhérentes à l'habitat collectif, comme le coût élevé des travaux, l'impossibilité d'obtenir le soutien d'une majorité des copropriétaires réunis en assemblée générale, ou la concentration d'une population défavorisée dans certaines copropriétés.
Dans les grands ensembles, dans certains quartiers prioritaires ou dans des centres-villes anciens, ce problème peut prendre des proportions très importantes. De lourds moyens financiers et juridiques sont alors nécessaires pour y mettre un terme et éviter de mettre en danger les occupants et de faire le lit des marchands de sommeil.
Dans ce contexte, un tel projet de loi était plus qu'urgent.
Pourtant, au cours des trente dernières années, nous avons voté de nombreuses lois visant l'habitat dégradé.
Nous avons institué de nouveaux outils, parfois mal connus, dont le cumul rend l'utilisation de plus en plus complexe.
Du fait de l'importance des charges d'investissement, les délais de réhabilitation des immeubles se trouvent allongés, jusqu'à atteindre, parfois, quinze ou vingt ans. Les copropriétaires paupérisés se retrouvent alors dans l'impossibilité de payer leurs charges ou les travaux d'entretien, tandis que la valeur marchande des immeubles qui se dégradent ne cesse de baisser. Quant aux occupants, ils sont dans l'impossibilité financière de se loger ailleurs.
Tous les ingrédients sont donc réunis pour créer de l'habitat indigne, dont un million de Français sont aujourd'hui victimes. Pour nos concitoyens le mal-logement peut avoir de réels effets sur la santé, l'éducation, l'équilibre familial, l'insertion sociale et la vie professionnelle.
Nous attendons donc beaucoup de ce projet de loi : il faut redonner de la dignité aux personnes, il faut qu'elles puissent vivre dans des logements décents.
Je ferai plusieurs observations sur le projet de loi en lui-même.
S'agissant, tout d'abord, de l'intervention des collectivités et des opérateurs afin de lutter contre l'habitat indigne, je salue les travaux réalisés en commission pour leur donner, légitimement, des outils plus efficaces et plus rapides en vue de permettre une intervention plus précoce des pouvoirs publics, de la rendre moins coûteuse, mieux planifiée, et avec des relogements mieux anticipés et davantage inscrits dans le projet urbain. Je pense ici au syndic d'intérêt collectif et à l'emprunt global et collectif. Néanmoins, j'attends désormais que le Gouvernement s'engage à financer ce dernier, si nous ne voulons pas qu'il reste lettre morte.
Par ailleurs, nous relevons sur le terrain que les occupants de logements insalubres sont trop souvent laissés dans l'ignorance des procédures de rénovation et des actes qui les concernent.
Pour encore plus d'efficacité et d'opérabilité, le groupe du RDSE a déposé des amendements visant à mieux accompagner, protéger et informer les occupants de ces logements. J'entends ici exprimer notre volonté de simplifier l'accès à l'information des copropriétaires, en posant la dématérialisation comme principe, ou à communiquer le constat d'insalubrité aux copropriétaires en même temps qu'au préfet.
S'agissant de la problématique des marchands de sommeil, nous saluons le travail effectué en commission. Celle-ci s'est fondée sur le retour d'expérience des maires pour retenir, à titre préventif, plusieurs évolutions sur le permis de louer et le permis de diviser, facilitant ainsi leurs conditions de mise en œuvre et la lutte contre ces marchands de sommeil.
Je veux enfin signaler un point de vigilance concernant la procédure d'expropriation. Le nouvel outil envisagé est intéressant ; néanmoins, il ne résout pas l'un des plus gros points de blocage possible lors de la mise en place d'une telle procédure, à savoir celui du relogement des occupants, que ce soit à titre temporaire ou définitif, notamment dans les très grandes opérations, qui nécessitent le relogement simultané de centaines de ménages, principalement dans un parc social déjà saturé. Il s'agit d'un vrai frein pour certaines opérations ; d'ailleurs, plus de 90 % des maires ayant répondu à la consultation ont soulevé cette difficulté, y compris pour des opérations plus ponctuelles.
Pour autant, parce que ce texte répond à une demande et à un besoin urgent, parce qu'il vient compléter intelligemment les dispositifs existants, institués par le plan Initiative Copropriétés et par la loi Élan, les membres du groupe du RDSE voteront en sa faveur.
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