Question d'actualité sur la fracture numérique
M. le président. La parole est à Mme Josiane Costes, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Josiane Costes. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le numérique apparaît comme un facteur de notre résilience face à la crise sanitaire. Il a permis le maintien de l'enseignement, de l'activité économique ou du lien social. Mais cette expérience nous a aussi rappelé l'ampleur des fractures sociale, territoriale et numérique.
Selon un récent rapport de l'Insee, un Français sur six est un illettré numérique, un sur cinq ne sait pas communiquer avec internet, un sur trois manque de compétences de base, et 80 % de ceux qui n'utilisent pas internet ont plus de soixante ans.
Les personnes les plus fragiles sont donc aussi celles qui rencontrent le plus de difficultés à accéder à cet outil indispensable. C'est d'ailleurs l'objet du travail de notre collègue Raymond Vall dans le cadre de la mission d'information sur la lutte contre l'illectronisme créée sur l'initiative du groupe RDSE.
Il faut encore ajouter les disparités de déploiement du réseau sur le territoire et le manque d'équipement des familles les plus précaires. Les difficultés liées à l'enseignement à distance l'illustrent : un seul ordinateur pour toute une famille ; un réseau que l'on atteint dans un coin de la maison ou au fond du jardin ; impossibilité dans certains logements de trouver le calme. Ces situations sont parfois insurmontables quand 5 à 10 % des élèves ont été injoignables.
Des initiatives existent : maisons France services, plan France Très haut débit, centres sociaux connectés ou pass numérique. Néanmoins, les circonstances actuelles conduisent à amplifier notre effort de réduction de toutes ces fractures, alors que les inégalités se multiplient. Si le confinement a accru l'intérêt pour le télétravail, cette perspective se solde aussi par des attentes déçues dans de nombreux territoires. La faiblesse du débit empêche trop souvent l'installation de nouveaux habitants, là où il y en a justement le plus besoin.
Envisagez-vous, monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, d'accélérer la politique de l'État en la matière ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics.
M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique. Madame Costes, vous évoquez une réalité particulièrement cruelle lors du confinement, mais qui préexistait à ce dernier. C'est une réalité que les élus et les services, sur le terrain, connaissent extrêmement bien, celle qui différencie ceux qui sont connectés de ceux qui ne le sont pas.
Cette réalité va au-delà du cas particulièrement problématique des personnes âgées. Ceux qui ont pu assister, comme moi, à des sessions de formation de Pôle emploi savent qu'on y rencontre énormément de jeunes qui sont très forts pour aller sur les réseaux sociaux, mais qui ont énormément de mal à actualiser leur fiche sur le site de Pôle emploi, à rédiger un CV ou même à transférer un e-mail.
Cette réalité a été particulièrement cruelle durant le confinement. Des tâches extrêmement basiques ont été inaccessibles pour nombre de nos concitoyens, qu'il s'agisse de télécharger une attestation de sortie ou même, dans leurs relations sociales, de réaliser une visioconférence avec leurs proches ou leurs petits-enfants, creusant par là une fracture qui est une fracture économique, sociale, sociétale et qui alimente une colère qui a affleuré lors du grand débat où quasiment à chaque réunion physique les participants ont évoqué le numérique comme un facteur et un vecteur d'une forme d'exclusion.
Nous devons faire plus. Nous devons travailler sur la connexion, c'est ce que Agnès Pannier-Runacher, Julien Denormandie et moi-même faisons. Nous devons accélérer l'effort sur l'équipement. Vous avez cité l'exemple des familles ayant un seul ordinateur. Quand cinq enfants doivent suivre l'éducation à distance, c'est un énorme problème. Nous devons particulièrement faire un effort sur les usages, puisqu'il ne s'agit pas d'avoir la connexion, encore faut-il savoir se servir d'internet.
Un certain nombre de politiques publiques ont été mises en place depuis trois ans pour accélérer la réduction de la fracture numérique. Ce que nous dit le confinement, c'est qu'il faut accélérer et que cette fracture, qui préexistait, est maintenant béante et qu'il faut s'en saisir au bon niveau, notamment dans le cadre du plan de relance. C'est ce à quoi nous travaillons.
M. Didier Mandelli. Très bien !
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