Question d'actualité sur la limitation de la vitesse à 80 km/h
Question de Jean-Claude Requier à Edouard Philippe, Premier Ministre
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste. – Marques d'intérêt sur plusieurs autres travées.)
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le Premier ministre, vous connaissez l'attachement indéfectible de mon groupe à l'égalité réelle entre les citoyens sur tous les territoires, quels qu'ils soient. C'est pour cela que nous défendons ceux qui se sentent parfois oubliés par Paris et qui subissent à la fois le recul des services publics et les effets délétères de l'enclavement.
Je ne vous apprends pas que l'abaissement de la limitation de vitesse à 80 kilomètres à l'heure sur certaines routes a été vécu par beaucoup comme une mesure vexatoire, totalement déconnectée des réalités. En réaction, le Sénat, dans sa grande sagesse, a voté le 20 février dernier, sur notre initiative, la possibilité de relever à 90 kilomètres à l'heure la limitation de vitesse sur certaines routes départementales et nationales.
La LOM, qui sera examinée en nouvelle lecture à la rentrée, a introduit un dispositif de même nature. La cause semblait donc entendue.
Pourtant, le Conseil national de la sécurité routière a publié la semaine dernière une grille d'analyse, c'est-à-dire une série de six recommandations destinées à « accompagner les décisions des élus », parmi lesquelles : « énoncer l'objectif recherché et les gains à retirer d'un relèvement de la vitesse », ou identifier des tronçons homogènes d'une longueur minimale de 10 kilomètres sans traversée d'agglomération.
Au-delà de ce vocable administratif, beaucoup de conseils départementaux s'interrogent aujourd'hui sur la valeur à accorder à ces recommandations, craignant surtout que l'on ne leur retire d'un côté la latitude d'action qu'on leur a rendue de l'autre.
Monsieur le Premier ministre, personne ici ne contestera la nécessité de faire mieux en matière de sécurité routière, mais personne ne veut non plus qu'il subsiste des citoyens de seconde zone. Pouvez-vous alors nous éclairer sur le statut de ces recommandations et, surtout, rassurer l'ensemble des élus locaux, eux qui connaissent le mieux nos territoires ? (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. Alain Fouché. Bravo, il a raison !
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président Requier, merci de votre question qui me permet de préciser ce qu'est le Conseil national de la sécurité routière.
Auparavant, un mot : vous avez évoqué vous-même la possibilité offerte par le projet de loi d'orientation sur les mobilités – « projet », car, comme chacun le sait ici, la commission mixte paritaire n'a pas été conclusive, et le texte devra donc repasser à l'Assemblée nationale – aux présidents de conseils départementaux de remonter la vitesse maximale, sur le réseau dont ils ont la gestion, à 90 kilomètres-heure.
L'exercice de cette faculté qui leur est offerte devra s'accompagner d'une instruction et d'une consultation dans le cadre des comités départementaux de la sécurité routière. Elle leur permettra de choisir la façon dont ils veulent organiser les choses sur ce réseau.
Il ne s'agit pas de revenir en quoi que ce soit sur cette possibilité offerte aux présidents de conseils départementaux, dont certains ont indiqué qu'ils voudraient se saisir quand d'autres, d'ailleurs, ont affirmé qu'ils ne souhaitaient pas changer la limitation à 80 kilomètres-heure.
Créé en 2001, le Conseil national de la sécurité routière est un organisme composé de 67 membres, dont 2 représentants du Sénat et 2 représentants de l'Assemblée nationale. Il est présidé par un élu local, en l'occurrence le maire de Flers, dans le magnifique département de l'Orne.
M. le président. Magnifique ! (Sourires.)
M. Roger Karoutchi. Absolument !
M. Bruno Retailleau. Absolument magnifique !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Quiconque connaît les départements de Normandie sait qu'ils sont magnifiques ! (Nouveaux sourires.)
Le Conseil national de la sécurité routière n'exprime pas la position du Gouvernement. Il s'agit d'un de ces organismes composés d'experts, d'élus locaux et nationaux. Il a formulé des aides à la décision, des recommandations, considérant, par exemple, que des changements trop systématiques de limitation de vitesse sur certains tronçons rendraient la lisibilité de la réglementation pour l'usager peu pratique et imparfaite.
Cette recommandation me paraît empreinte de bon sens et d'expertise, mais il appartiendra, bien entendu, à ceux qui sont les gestionnaires des réseaux de prendre leurs responsabilités ; c'est tout le sens de la LOM et de ce que nous avons voulu mettre en œuvre.
Pour sa part, l'État, qui est lui aussi gestionnaire d'une partie du réseau concerné, a fait le choix de fixer la limitation maximale à 80 kilomètres-heure, un choix qu'il assume par la voix du Premier ministre, chef du Gouvernement.
Il appartiendra aux présidents des conseils départementaux d'utiliser la faculté qui leur sera ouverte par la loi d'orientation sur les mobilités, lorsqu'elle aura été publiée, et de prendre en compte ou pas, selon leur souhait, ces orientations.
Il me semble qu'il n'est jamais problématique en soi de pouvoir s'appuyer sur des recommandations préparées par des experts. Les choses sont claires : les présidents prendront leurs responsabilités.
Certains ont cru lire, dans ces aides à la décision, des recommandations formulées par le Gouvernement ; ce n'est pas le cas et vous m'avez offert, monsieur le président Requier, la possibilité de le préciser. Je vous en remercie. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
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