Débat en faveur de la souveraineté énergétique française
M. Jean-Yves Roux. Madame la ministre, j'ai une pensée pour tous nos concitoyens qui peinent à remplir leur cuve de fioul, qui éteignent leur chauffage et qui redoutent l'arrivée de leurs factures. Le fait n'est pas nouveau, mais il est douloureux…
En cette période automnale, nos mairies, nos centres communaux d'action sociale (CCAS) et nos départements se mobilisent, comme chaque année, au service des plus fragiles. Mes chers collègues, notre souveraineté énergétique consiste aussi en ceci : continuer d'agir au plus près, afin que tout un chacun puisse disposer d'une énergie suffisante pour mener une vie décente. Pourtant, cette « énergie nécessaire » est pourtant en train d'évoluer.
Vous l'avez rappelé, madame la ministre, nos besoins en électricité auront augmenté de plus de 15 % d'ici à 2035 et de plus de 35 % d'ici à 2050. L'accroissement de sobriété énergétique auquel nous nous sommes engagés est lent et nous sommes assez loin de l'objectif de 40 % d'énergies renouvelables d'ici à 2030. Or cet engagement nous oblige.
Dans ce contexte, je m'interroge sur le projet de renouvellement d'un tiers de nos contrats de concessions hydroélectriques en 2023 et de possibles ouvertures de ces ouvrages à la concurrence, à la découpe. Compte tenu des besoins croissants, la tentation est en effet grande de privatiser ces concessions et d'accélérer à tout va la production hydroélectrique, sans respecter les multiples usages partagés : le loisir, l'approvisionnement local et les usages agricoles.
Les acteurs de l'hydroélectricité s'inquiètent légitimement du changement de gouvernance, radical, technocratique et totalement libéralisé, qui pourrait se profiler.
Madame la ministre, à quelques jours de la présidence française de l'Union européenne et, il faut le rappeler, soixante-dix ans après la création de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA), quelles initiatives européennes comptez-vous prendre pour assurer la protection de notre modèle national de production hydroélectrique, qui fait la fierté de notre pays ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement. Monsieur le sénateur Roux, en ce qui concerne votre premier point – la protection du pouvoir d'achat –, la lutte contre la précarité énergétique fait partie de nos priorités. Je rappelais, à cet égard, le chèque énergie exceptionnel de 100 euros et l'indemnité inflation.
Par ailleurs, en tant que ministre chargée du logement, je mène avec les associations un travail sur la lutte contre la précarité énergétique, notamment en faisant en sorte que les ménages les plus modestes puissent avoir accès à des bouquets de travaux qui leur permettent de rénover leur logement et en incitant les propriétaires bailleurs à rénover les passoires thermiques. En effet, en général, on trouve dans ces logements nos concitoyens les plus modestes, dont les factures peuvent être extrêmement élevées.
La seconde partie de votre question porte sur l'hydroélectricité. Cette source d'énergie fait évidemment partie de notre mix énergétique. Il s'agit d'une énergie renouvelable flexible et compétitive, très importante pour le développement économique et le dynamisme de nos territoires.
Selon le droit français, les concessions hydroélectriques échues doivent être renouvelées par mise en concurrence. Or plusieurs concessions sont arrivées à échéance entre la fin de 2011 et aujourd'hui, sans que la procédure concurrentielle ait été engagée, les gouvernements successifs s'étant donné le temps de préparer la mise en concurrence avec l'ensemble des acteurs.
Ce retard ayant été constaté par la Commission européenne, celle-ci a engagé un contentieux en 2015 et, en mars 2019, elle a mis en demeure la France, ainsi d'ailleurs que d'autres pays européens, de respecter le droit communautaire en matière d'attribution des droits d'exploitation de l'hydroélectricité.
Cette situation nuit aux investissements dans le secteur, elle est source d'incertitude pour les entreprises, les salariés et les collectivités. C'est pourquoi le Gouvernement a engagé des discussions avec la Commission européenne pour trouver une solution.
Dans le cadre des réflexions menées autour de la réorganisation du groupe EDF, le Gouvernement explore également la voie consistant à attribuer sans mise en concurrence les concessions à une structure publique dédiée, contrôlée par l'État ; c'est le régime de la quasi-régie, qui s'accompagne d'exigences fortes faisant l'objet d'échanges avec la Commission. Aucun accord n'a encore été trouvé, aucune décision n'a encore été prise, mais ce sujet reste très fortement soutenu par le gouvernement français.
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